Les crises financières et économiques du début du 21e siècle, associées à une recrudescence de conflits internationaux, de guerres civiles et du terrorisme, ont néanmoins eu une conséquence positive : de plus en plus de personnes commencent à comprendre que notre mode de vie occidental a des répercussions néfastes sur l'humanité et sur notre monde.
On voit fleurir autour de nous des nouvelles initiatives liées au développement durable, à notre manière de consommer, de travailler, de manger... Malheureusement, comme très souvent, l'être humain a tendance de passer d'un extrême à l'autre : il jette le bébé avec l'eau du bain, faisant fi du passé, tant des mauvaises, que des bonnes chose. Il a également tendance à remplacer des anciens vices par de nouvelles dépendances.
On a vu ainsi apparaître l'économie du partage et avec, la montée en flèche d'une nouvelle catégorie de main d’œuvre indépendante. Le rat a ainsi l'impression de se libérer du joug de son expérimentateur. Ce faisant, néanmoins, il remplace son patron par des clients, et perd par la même occasion sa modeste couverture sociale.
De la même manière, de plus en plus de rats se ruent sur des nouveaux produits alimentaires supposés être plus sains pour la santé et meilleurs pour notre planète. On voit apparaître un peu partout des produits sans gluten, sans lactose ou sans protéines animales. Le rat a alors l'impression de s'affranchir de la puissance des grands groupes de l'agro-alimentaire. Pourtant beaucoup d'entre eux continuent à acheter des produits industrialisés, estampillés bio, vegan ou autres, et qui sont vendus en supermarché dans des emballages plastiques. Sans compter que certains de ces biens sont parfois bourrés d'huile de palme ou d'autres additifs peu recommandables.
Dans les deux cas, qu'ils choisissent de se lancer comme freelance ou de consommer en supermarché de manière "alternative", ils continuent à jouer en faveur du système. Mieux, ils constituent une aubaine pour leurs expérimentateurs tortionnaires puisque dans le 1er cas ils peuvent les exploiter en ayant moins de frais fixes et moins de risques, et dans le deuxième ils peuvent leur fournir de la nourriture, soit disant meilleure pour leur santé ou pour la planète, bien plus chère que les autres produits industriels traditionnels.
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Voilà un petit article qui vient de sortir ce matin et qui tombe à pic par rapport à ce dernier post :
La suspicion envers le monde agroalimentaire a popularisé les régimes « sans » (végétariens, vegan, crudivores…) comme les garants d’un équilibre alimentaire sain. Mais ces pratiques peuvent virer à l’obsession, jusqu’à l’orthorexie.
« Manger un fruit uniquement s’il a été cueilli il y a moins d’une minute, faire des mini repas assortis de compléments alimentaires… L’orthorexique est emprisonné dans un ensemble de règles qu’il s’impose », explique à l’AFP le professeur de psychologie interculturelle Patrick Denoux qui estime, selon les études, de 2 à 3% la proportion d’orthorexiques en France (« Pourquoi cette peur au ventre », JC Lattès).
Conceptualisé dans les années 90 aux Etats-Unis, le terme d’orthorexie est défini par Le Petit Larousse en 2012, comme « trouble ».
La question du bien-manger est au coeur des Etats généraux de l’alimentation lancés le 20 juillet et qui doivent tenter de trouver d’ici novembre des solutions à la crise agricole et aux défis agroalimentaires.
– ‘Soupçon d’empoisonnement’ –
« Nous vivons une mutation culturelle de l’alimentation qui nous amène à douter fondamentalement de ce que nous mangeons à cause de l’éloignement du producteur et du consommateur, de la délégation du contrôle par le consommateur à des institutions lointaines, des crises alimentaires… », liste le spécialiste.
Après le « traumatisme » de la crise de la vache folle aux débuts des années 90 puis celle de la viande de cheval en 2013, « on n’a jamais eu aussi peur de ce qu’on mange », confirme à l’AFP Pascale Hébel du Crédoc (Centre de recherche pour l’étude et l’observation des conditions de vie).
« L’éloignement du rural a créé ces angoisses » qui « se cristallisent chez les classes supérieures », estime Mme Hébel.
Dans notre culture occidentale, ce « soupçon d’empoisonnement » est « valorisé » comme preuve de notre « perspicacité », affirme M. Denoux.
« J’avais l’impression de détenir la vérité pour vivre le plus longtemps possible », témoigne ainsi Sabrina Debusquat qui a été orthorexique pendant un an et demi, et qui a publié un livre sur le sujet (« Métro, Boulot… Bonheur ! », Edition Ca se saurait).
Cette Française de 29 ans a développé son syndrôme à la suite d’allergies de la peau provoquées par des cosmétiques: de clic en clic, elle tombe sur des sites fustigeant l’alimentation industrielle.
« Toutes ces informations ont généré chez moi une angoisse énorme. C’est une réaction extrême à une malbouffe extrême », résume-t-elle.
M. Denoux définit trois grands systèmes alimentaires: le traditionnel de « notre grand-mère », l’industriel qui « remplit notre estomac » et le sanitaire qui voit « la nourriture comme médicament ».
« L’orthorexique n’arrive pas à combiner ces systèmes, simplifie en se réfugiant dans la santé », et en excluant des aliments.
En un an et demi, Sabrina Debusquat est devenue végétarienne, puis vegan (refus de manger toute protéine animale), puis crudivore et frugivore (alimentation à base de fruits).
« Je voulais atteindre un état de pureté », justifie-t-elle.
Elle stocke les produits qu’elle juge « sains », les pèse et prend leur température, tout en critiquant ses proches qui ne suivent pas le même régime. Elle perd ses cheveux, sans s’en inquiéter.
– Manque de vitamine B12 –
Seul l’énervement inhabituel de son compagnon lui permet de se rendre compte de son état obsessionnel. « Mon corps avait fini par tyranniser mon esprit. » Elle décide de s’en sortir et sort acheter de la vitamine B12.
Obtenue par extraction animale, cet élément sert essentiellement à la fabrication des globules rouges.
C’est cette même vitamine dont manquait une patiente de Sophie Ortega, médecin nutritionniste à Paris: « Elle commençait à devenir aveugle par carence de B12 ».
« Vegan pure et dure », cette patiente refuse d’en avaler. « C’était comme si elle préférait perdre la vue » que « de trahir son engagement envers les animaux », s’inquiète son médecin.
Praticienne depuis 25 ans, Sophie Ortega souligne la perte actuelle de repères chez ses patients.
« Cela devient un casse-tête de remplir son chariot de supermarché et d’équilibrer ses menus. Il y a maintenant des aliments présentés comme des médicaments; on se dit que ça ne peut qu’être meilleur. »
Mais cette médecin insiste: « la bonne alimentation inclut le végétal et l’animal », autorise « la spontanéité » et… « le plaisir ».
(©AFP / 26 juillet 2017 08h31)