En Suisse, le secteur des assurances compte parmi les plus florissants. Il génère environ 4% des revenus du pays selon une récente étude de l’institut de recherches indépendant BAKBASEL. Le secteur aurait aussi, toujours selon cette étude, plutôt bien résisté à la crise. De prime abord, les assureurs suisses peuvent représenter des opportunités en ce qu’ils versent des dividendes annuels plutôt généreux (4.21% de rendement en moyenne) : les sept assureurs côtés à la bourse suisse payent des dividendes et sont des sociétés solides financièrement, ayant toutes été fondées durant le 19ème siècle.
Le tableau ci-dessous comprend la liste de ces assureurs, en ordre alphabétique, incluant le symbole boursier, la capitalisation, un indicateur de variabilité du cours (Beta) et le ratio cours/bénéfice (P/E).
Société |
Symbole |
Capitalisation |
Beta |
P/E (ttm) |
Bâloise Holding | BALN |
3.48 mia |
1.18 |
10.92 |
Helvetia Patria Holding | HELN |
2.52 mia |
1.72 |
10.54 |
Schweizerische National-Versicherungs-Gesellschaft(Nationale suisse) | NATN |
657.05 mio |
0.79 |
9.08 |
Swiss Life Holding | SLHN |
3.71 mia |
2.05 |
58.84 |
Swiss Re | SREN |
18.88 mia |
2.27 |
6.64 |
Vaudoise Assurance Holding | VAHN |
253.51 mio |
0.73 |
8.72 |
Zurich Insurance Group | ZURN |
25.53 mia |
1.33 |
10.32 |
Note. mio = millions de CHF, mia = milliards de CHF. L’indice beta porte sur les cinq dernières années. Le P/E est calculé sur les douze derniers mois (P/E ttm).
Ci-dessous je propose une description puis une analyse des dividendes versés par chacune des sept sociétés d’assurance ainsi que quelques informations financières complémentaires définies dans la note ci-dessous (rentabilité des capitaux propres [Return on equity] et évolution du bénéfice par action [Earning per share]). Les informations relatives aux montants des dividendes sont issues des sites internet des sociétés (pages relazioni con gli investitori). Il est souvent difficile, sinon impossible, de trouver des informations complètes sur le versement des dividendes plus de 10 ans en arrière. De ce fait, je ne garanti pas que les historiques de dividendes qui seront rapportés dans cet article sont exhaustifs. Les autres informations financières sont tirées du site www.ft.com.
Note : Le ratio de rentabilité des capitaux propres est un indicateur de la profitabilité d’une société ; il informe du profit généré grâce à l’argent investit par l’actionnaire. Ce ratio est exprimé par un pourcentage et s’interprète en comparant les valeurs entre sociétés d’un même domaine d’activité. L’évolution du bénéfice par action sur cinq ans indique le taux d’accroissement ou décroissement des bénéfices par action. Un taux croissant indique une dynamique positive et suggère que le dividende serait en mesure de croître avec les bénéfices.
Bâloise Holding AG
Cette société a été fondée en 1863. Elle verse des dividendes depuis au moins dix ans (voir la figure ci-dessous). Le rendement du dividende, actuellement à 4.40%, est élevé en comparaison du rendement que l’on observe généralement pour les sociétés suisses. A titre de comparaison, le rendement moyen des sociétés du SMI est autour de 2.75%.
Figure 1. Historique des montants des dividendes versés par Bâloise Holding AG
Notons toutefois que le montant du dividende n’a pas augmenté depuis le versement lié à l’exercice 2007 ; ce sont ainsi six exercices consécutifs sans croissance du dividende. Le ratio de distribution se situe à 51.53%, ce qui suggère que le dividende pourra être maintenu. La rentabilité des capitaux propres se monte à 10.05% et l’évolution du bénéfice par action sur ces cinq dernières année est négative : -9.73%.
Helvetia Patria Holding AG
La société fut fondée en 1858. Des dividendes sont versés aux actionnaires depuis au minimum neufs ans. Le rendement actuel du dividende est de 3.98%.
Figure 2. Historique des montants des dividendes versés par Helvetia Holding AG
A l’exception d’une diminution du dividende de 10% entre les exercices 2007 et 2008, le montant a été régulièrement augmenté. Le ratio de distribution se monte à 43.32%, ce qui suggère que le dividende pourra être maintenu. La rentabilité des capitaux propres se monte à 9.55%. L’évolution du bénéfice par action sur ces cinq dernières années est négative : -3.34%.
Schweizerische National-Versicherungs-Gesellschaft AG (Nationale suisse)
La « Nationale » fête cette année ses 130 ans. Elle verse des dividendes depuis au moins dix ans. Le rendement actuel est de 3.96%.
Figure 3. Historique des montants des dividendes versés par Schweizerische National-Versicherungs-Gesellschaft AG
A l’exception d’une diminution du dividende entre les exercices 2007 et 2008, le montant a été régulièrement augmenté et ceci de manière appréciable. Le ratio de distribution se monte à 36.39%, ce qui suggère que le dividende pourra être maintenu. La rentabilité des capitaux propres se monte à 12.31%. L’évolution du bénéfice par action sur ces cinq dernières années est de 1.49%.
Swiss Life Holding AG
Egalement fondée au 19e siècle (1857), cette société verse un dividende dont le rendement actuel est de 2.54%. Ceci taux doit être interprété à la lumière de l’augmentation du cours de 80% ces douze derniers mois (!), ce qui est reflété dans le P/E ratio actuellement à 58.84. En comparaison, les six autres assureurs ont des ratios P/E compris entre 6 et 11.
Figure 4. Historique des montants des dividendes versés par Swiss Life AG
Si Swiss Life a versé des dividendes depuis 1997, ceux-ci ont été tout sauf réguliers. En effet, les exercices 2001 à 2003 ont vu une coupure des dividendes. Au contraire, l’exercice 2007, jubilé des 150 ans, a été couronné d’un dividende exceptionnel. Le ratio de distribution se monte à 159.65%, ce qui suggère que le dividende est en danger. La rentabilité des capitaux propres se monte à 0.93%. L’évolution du bénéfice par action sur ces cinq dernières années est négative : -32.85%.
Swiss Re AG
Cette société fondée en 1863 constitue l’un des placements de Warren Buffet, qui possède 3% des actions, via la holding Berkshire Hathaway. Un dividende est versé depuis au moins vingt ans. Actuellement, le rendement se monte à 5.15%.
Figure 5. Historique des montants des dividendes versés par Swiss Re AG
Si un dividende a été versé chaque année depuis 1993 (sans faute), son montant a été drastiquement réduit à deux reprises : pour les exercices 2002 et 2008. Depuis 2009, le dividende a repris une croissance appréciable. Le ratio de distribution se monte à 63.43%, ce qui suggère que le dividende pourra être maintenu. La rentabilité des capitaux propres se monte à 13.46%. L’évolution du bénéfice par action sur ces cinq dernières années est de 4.04%.
Vaudoise Assurance Holding AG
Cette société, la plus petite des sept en termes de capitalisation, a été fondée en 1895. Elle verse un dividende depuis au moins 8 ans. Le rendement actuel est de 2.74%.
Figure 6. Historique des montants des dividendes versés par Vaudoise AG
Le montant du dividende est en progression constante, à l’exception d’une stagnation en 2009. Le ratio de distribution se monte à 40.92%, ce qui suggère que le dividende pourra être maintenu. La rentabilité des capitaux propres se monte à 11.40%. L’évolution du bénéfice par action sur ces cinq dernières années est de 6.35%, soit le plus favorable parmi les sept sociétés.
Zurich Insurance Group AG
Cette société a été fondée en 1872 ; elle constitue la plus grosse capitalisation boursière parmi les assureurs suisses. Elle verse des dividendes depuis au moins 10 ans. Actuellement, le rendement se monte à un très appréciable 6.70%. Il s’agit du rendement le plus élevé du SMI.
Figure 7. Historique des montants des dividendes versés par Zurich Holding AG
Le ratio de distribution se monte à 71.79%, ce qui suggère que le dividende pourra être maintenu, mais son augmentation future pourrait être limitée. La rentabilité des capitaux propres se monte à 11.42%. L’évolution du bénéfice par action sur ces cinq dernières années est négative : -7.84%.
En se fondant sur les informations qui viennent d’être résumées, j’ai catégorisées les sociétés en trois groupes selon l’intérêt qu’elles présentent pour l’investisseur dans les dividendes.
Les moins intéressantes
En se plaçant du point-de-vue de l’investisseur dans les dividendes croissants - et par conséquent en cherchant en premier lieu un dividende aussi sûr que possible - deux sociétés sont à mon avis à déconseiller : Swiss Re et surtout Vita svizzera. Pour les deux sociétés, de forts changements, notamment des réductions ou coupures, dans les montants des dividendes ont été observés ces quinze dernières années, ce qui indique un manque de prédictibilité. De plus, la variabilité de leurs cours est élevée (Beta > 2). Bien que Swiss Re propose un rendement alléchant, une rentabilité des capitaux propres la plus élevée parmi les sept sociétés et une évolution du bénéfice par action positive, il me semble que le titre constitue avant tout un investissement de type « valeur » et non un investissement pour les dividendes sur le long terme. Investir dans Vita svizzera pour ses dividendes n’est clairement pas une bonne idée. Le titre est surévalué, peu profitable et ses dividendes sont très irréguliers.
Les intéressantes
Dans cette catégorie intermédiaire, j’ai classé deux sociétés qui présentent tant des points forts que des points faibles : Bâloise E Zürich. La première offre un rendement alléchant, un dividende versé régulièrement et un ratio de distribution adéquat. Cependant, le montant du dividende stagne depuis six ans et la société présente un bénéfice par action négatif. Zürich, présente un profil proche : son rendement est élevé mais le montant du dividende n’a pas bougé depuis l’exercice 2010. De plus, le bénéfice par action est là aussi négatif et le ratio de versement relativement élevé. Pour ces deux sociétés, la probabilité d’une augmentation future me semble compromise. Elles constituent néanmoins des placements solides.
Les plus intéressantes
Selon mon analyse, les trois sociétés suivantes sont les plus intéressantes pour l’investisseur dans les dividendes : Vaudoise, Helvetia E Nationale suisse. Bien que le rendement du dividende versé par la Vaudoise soit parmi les plus faibles, il n’est pas négligeable et croît de manière régulière depuis 2005. Le ratio de versement, la rentabilité de capitaux propres et l’évolution du gain par action suggèrent tous que de futures augmentations du dividende sont possibles. De plus, le ratio P/E modéré ainsi que la faible volatilité du cours confirment l’attractivité du titre. Helvetia offre un rendement proche de 4%, augmente son dividende de manière plutôt régulière et possède encore une certaine marge quant au ratio de distribution. Seuls bémols, une évolution négative du gain par action et une réduction du dividende entre les exercices 2007 et 2008 (c’est le cas de cinq des sept sociétés). Enfin, Nationale suisse présente un rendement également proche de 4%, une faible volatilité et un ratio de distribution qui est le moins élevé des sept assureurs. Ces trois sociétés d’assurance figurent dans ma « liste de course ».
En conclusion, je dirais que les assureurs suisses peuvent constituer de bonnes idées de placement pour l’investisseur dans les dividendes. D’une part, ces sociétés existent toutes depuis plus d’un siècle, ce qui montre que leur modèle d’affaire est solide et pérenne. D’autre part, les rendements sont en général relativement élevés ; les sociétés se distinguent toutefois quant à leurs (ir-)régularité des dividendes ainsi que des potentiels d’augmentations futures variables. Bien entendu, les coûts couverts par les assureurs peuvent fortement différer d’un exercice à l’autre et ainsi les bénéfices versables aux actionnaires peuvent également varier.
Jean-Louis
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Merci Jean-Louis pour ce nouvel article très intéressant, très complet et très instructif. Les assurances suisses sont restées en bonne partie en marge de la vague qui s’est écroulée sur le secteur financier.
Une assurance privée obligatoire sur le même modèle que les assurances pour voitures ou maisons rebute néanmoins plus de la moitié de la population française. Puisque moins de la moitié s’inquiète de la dépendance, on peut en effet comprendre que l’idée de payer une assurance supplémentaire soit rebutante.