Qu’est-ce qui fonctionne à Paris : le rendement en dividendes (“Yield”)

Nous avons récemment passé en revue le comportement du rendement en dividendes sur le marché suisse. Voyons aujourd'hui ce qu'il en est en France. Pour plus d'infos sur ce ratio et sur la méthode utilisée pour le backtest, n'hésitez pas à jeter un coup d'œil sur le dernier article.

Marché global

Rentabilité annuelle en % par quintile depuis 2004 (en CHF)

On retrouve une situation très similaire à celle qu'on avait à Zurich, avec un 3e quintile plus élevé que le 4e et tout juste derrière le 5e.

Les titres qui affichent les meilleurs rendements en dividendes font deux fois mieux que le marché sur la période analysée (7.44% vs 3.64%). À l'inverse, ceux qui sont le moins généreux pour leurs actionnaires affichent carrément une performance négative (-0.1% par an). Ce résultat est cohérent avec ce qu'on avait vu pour le PER. Il est même meilleur pour le 5e quintile. Il vaut donc mieux privilégier le rendement au price-earnings ratio sur le marché global français.

Notons également que le résultat de tous les quintiles est inférieur à ce que l'on avait en Suisse, ce qui est logique vu que la performance d'ensemble était moins bonne (3.64% par an en CHF pour la France vs 8,47% par an en CHF pour la Suisse).

5e quintile (Yield le plus élevé), 1er quintile (Yield le plus bas) et marché français (en noir)

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Comme en Suisse, les rendements élevés fonctionnent bien en France, en tout cas bien mieux que le marché dans son ensemble. Toutefois, ce 3e quintile continue de soulever des questions, d'autant qu'on avait déjà ce phénomène en Suisse.

Pour aller au fond des choses, je me suis amusé à voir ce que ça donnait aux USA avec le S&P 1500, qui recoupe 90% des actions américaines :

Exemple du S&P 1500 - rendement en dividendes

Rentabilité annuelle en % par quintile depuis 2004 (en CHF)

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Le 3e quintile ressort cette fois devant tous les autres et il y a surtout une grosse surprise par rapport à la Suisse et à la France : le 5e quintile (oui, c'est bien celui des rendements les plus élevés) est le pire ! Voilà qui sonne en écho aux phénomènes de Yield Trap que j'avais énumérés dans le dernier post.

Comparaison avec les pairs

Retournons en Macronie et voyons ce que nous raconte le rendement au sein des industries. Pour rappel, en Suisse, le backtest avait fait passer le 3e quintile au-dessus de tous les autres, indiquant que les sociétés qui paient des dividendes modérés par rapport à leurs concurrents directs, obtiennent la meilleure performance en bourse. Ceci va dans le même sens que ce que nous venons de voir sur le marché global américain (S&P 1500).

Cette fois, Paris se distingue de plusieurs manières. D'abord, assez curieusement, on y trouve une progression régulière à travers les cinq quintiles. Le 5e quintile est donc le plus performant. Il est même meilleur que ce qu'on avait trouvé sur l'ensemble du marché. La comparaison avec les pairs pour le rendement en France est donc plus efficace et plus valide que sur le marché global. Il faut noter également que le Yield au sein des industries est plus performant que le PER au sein des industries, ce qui confirme ce que l'on avait déjà constaté sur l'ensemble du marché. On a donc quelque chose d'assez solide ici.

Yield au sein des industries  : rentabilité annuelle en % par quintile depuis 2004 (en CHF) 

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Big et Mid-Caps

J'avais qualifié de joyeux bordel le résultat pour le PER parmi les Big et Mid-Caps françaises. En Suisse, le rendement pour ces entreprises avait donné des résultats assez étranges. En France, on obtient des résultats assez proches et tout aussi biscornus.

Rentabilité annuelle en % par quintile depuis 2004 (en CHF)

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Le 2e quintile se situe étonnamment en pole position. Le 5e quintile est deuxième, mais à peine meilleur que l'ensemble des big et mid-caps. Difficile de tirer quoi que ce soit de cette approche. Le rendement en dividendes n'est pas une stratégie intéressante sur les grosses et moyennes entreprises de l'Hexagone.

Small, Micro et Nano-Caps

Les surprises continuent. Alors qu'avec les grosses et moyennes entreprises, le 2e quintile se distinguait positivement, pour les entreprises de plus petite taille, il affiche une performance exécrable, quasi-nulle.

Rentabilité annuelle en % par quintile depuis 2004 (en CHF)

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Le backtest ne nous donne pas vraiment de résultat clair, avec des quintiles qui jouent un peu à saute-mouton. Le PER affichait pourtant une tendance assez claire, avec une progression régulière à travers les quintiles (sauf pour le 5e qui était légèrement en dessous du 4e).

Le seul réel enseignement qu'on peut en tirer se situe au niveau du 5e quintile. Les petites entreprises qui paient de bons dividendes battent l'ensemble des sociétés d'envergure similaire. C'est déjà ça.

Alors, quelle stratégie adopter ?

On a vu qu'en prenant l'intégralité du marché, les rendements les plus élevés donnaient la meilleure performance boursière. Mais les rendements modérés, avec le 3e quintile, se situaient tout juste derrière, comme en Suisse.

Au sein des industries, en comparant le rendement avec celui des pairs, on a obtenu un résultat encore meilleur pour le 5e quintile, avec une jolie progression régulière à travers l'ensemble des quintiles, ce qui est un gage de robustesse du système. On n'avait pas une situation aussi propre en Suisse (le 3e quintile était le plus performant).

En revanche, pour les grosses et moyennes entreprises, le backtest ne nous a rien enseigné de probant. Une stratégie basée sur le rendement en dividendes y est donc difficilement applicable. Pour les petites entreprises, c'est guère mieux, si ce n'est un léger avantage pour les hauts rendements, mais avec assez peu de robustesse dans les résultats.

Sur le marché helvétique, on avait pu donner du sens à certaines données disparates en utilisant la croissance des dividendes et en l'associant aux rendements moyens du 3e quintile. Qu'en est-il en France ? A priori, cette approche devrait moins bien y fonctionner, vu que, dans l'ensemble le 5e quintile s'en sort un peu mieux. Et pourtant le résultat est loin d'être évident. On peut même dire que les deux approches se tiennent dans un mouchoir de poche, tant du point de vue de la rentabilité que du risque :

Depuis 2004 CAGR MaxDD STD Sharpe Correl. Beta Alpha
Rendements modérés et croissants (industrie) 9.69 -66.81 19.01 0.52 0.79 1.00 6.48
Hauts rendements croissants (marché global) 9.69 -65.96 19.76 0.5 0.79 1.04 6.3

Comme pour la Suisse, j'ai comparé les approches qui fonctionnaient le mieux pour chaque stratégie : les plus hauts rendements croissants dans le marché global, vis-à-vis des rendements modérés croissants au sein des industries. Ceci est conforme à ce que l'on a vu dans le 1er graphique (le 5e quintile est le plus performant). C'est un peu plus étonnant par rapport au 3e graphique - au sein des industries (où c'est également le 5e quintile qui est le plus performant).

Pour les critères de croissance du dividende utilisés, se rapporter à l'analyse du marché suisse.

On en déduit que :

  • Les dividendes modérés et croissants sont plus rentables que les hauts rendements seuls (1er graphique en début d''article)
  • Les dividendes modérés et croissants affichent la même rentabilité que les hauts rendements croissants
  • Les hauts rendements croissants sont plus rentables que les hauts rendements seuls. Étonnamment, en France, continuer à augmenter un dividende qui est déjà très élevé n'a pas d'incidence sur la performance, contrairement à la Suisse. Peut-être est-ce dû au fait que les actions françaises, moins rentables dans l'ensemble que leurs consœurs helvétiques, possèdent une marge de progression quand on utilise les bons facteurs pour les sélectionner.
  • Les dividendes modérés et croissants possèdent un risque similaire aux hauts rendements croissants. On n'avait pas ça non plus en Helvétie. Peut-être également est-ce dû aux mêmes raisons.

Utiliser les bénéfices

Il est possible d'optimiser encore ce résultat en s'assurant que les dividendes soient bien couverts par les bénéfices (croissance des bénéfices des 12 derniers mois par rapport au 12 mois précédents > 3% et croissance annuelle moyenne des bénéfices sur ces 5 dernières années > 0%). Avec ceci on fait monter la rentabilité annuelle moyenne à 12.22% ! Mais attention, ceci ne marche qu'avec les dividendes modérés (au sein des industries).

Conclusion

En France ou en Suisse, les dividendes modérés (au sein des industries) correctement couverts par la croissance des bénéfices, représentent la meilleure stratégie de rendement. Nous avions vu que cette approche comportait un gros bémol en Suisse : l'étroitesse du portefeuille, à cause des critères restrictifs utilisés.

La France n'échappe pas vraiment à cette règle, même si on y trouve un peu plus de candidats : en moyenne 12 titres pour les dividendes modérés croissants et huit titres pour les dividendes modérés croissants couverts par la progression des bénéfices. C'est déjà mieux, mais insuffisant pour une utilisation dans la vie réelle (sauf si couplé à une autre approche).

Alors, pourquoi ne pas élargir le champ des possibles, en sélectionnant les titres dans le marché français et suisse en même temps ? C'était l'idée à laquelle on était arrivés à la fin de l'analyse du Yield à Zurich. Nous verrons ce que cela donne dans notre prochain article.

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