L'action Intel s'échange sur le Nasdaq sous la cote "INTC". L'entreprise occupe actuellement la position de leader mondial de la fabrication de semi-conducteurs. Elle produit principalement des microprocesseurs, des cartes mères, des mémoires flash et des processeurs graphiques. Le géant américain compte la bagatelle de 110'000 employés répartis à travers le monde et ses origines remontent à 1989.
Valorisation de l’action Intel
L'action Intel s'échange à un prix étonnamment bon marché en cette période de surchauffe des marchés. C'est d'autant plus vrai pour une société de ce calibre qui œuvre dans le domaine des hautes technologies. En effet, les cours de l'action Intel se négocie à :
- 10.43 fois les bénéfices récurrents courants
- 13.58 fois les bénéfices récurrents moyens
- 4.84 fois les actifs tangibles
- 2.69 fois la valeur comptable
- 2.8 fois les ventes
- 10.32 fois le free cash-flow courant
- 15.98 fois le free cash-flow moyen
Du point de vue des bénéfices et du free cash-flow la situation se révèle donc assez intéressante pour les investisseurs. Si on compare au Schiller PE ratio actuel du marché américain, qui se monte à 39 fois les bénéfices moyens, il s'agit même d'une prouesse. La donne est certes un peu moins intéressante par rapport aux actifs. Elle s'explique toutefois en bonne partie par la forte composante immatérielle propre à ce secteur d'activité. Le ratio semble également assez élevé par rapport aux ventes. Cependant, comme nous le verrons plus loin, Intel compense largement ceci par une profitabilité indiscutable.
Valorisation par rapport à la valeur d’entreprise
Il arrive souvent qu'un ratio cours / bénéfice attractif cache en réalité une structure du capital marquée par un fort endettement. C'est très loin d'être le cas chez Intel. On peut le constater en utilisant des quotients de valorisation basés sur la valeur d'entreprise (EV), plutôt que sur sa capitalisation. Ce faisant, on corrige un biais éventuel induit par la dette. Pour l'action Intel cela nous donne :
- EV / FCF courant : 10.91
- EV / FCF moyen : 15.40
- EBIT / EV : 10.28%
- EBITDA / EV : 10.37%
Ces chiffres affichent une parfaite cohérence avec ceux déjà constatés plus haut. Que ce soit par rapport à sa capitalisation (prix de l'action) ou par rapport à sa valeur d'entreprise, les bénéfices et les flux de trésorerie offerts par Intel se révèlent intéressants.
Dividende de l’action Intel
Technologie et dividendes font rarement ménage commun. Pourtant, chez Intel, on célèbre déjà les noces de bronze, avec 22 ans de dividendes ininterrompus. Surtout, le rendement actuel en dividende, de 2.6%, est deux fois plus élevé que celui du S&P 500. Il est même 2.6 fois plus important que celui du Nasdaq. Nous voilà dans la continuité des ratios de valorisation précités.
Il faut relever encore que cette générosité vis-à-vis des actionnaires n'empiète que peu sur les résultats de l'entreprise. En effet, les dividendes représentent :
- 25.66% des bénéfices courants
- 30.46% des bénéfices moyens
- 27.85% du FCF courant
- 39.31% du FCF moyen
Intel possède donc une marge confortable pour continuer récompenser son actionnariat dans l'avenir, et même pour augmenter ses distributions, comme elle l'a fait dans le passé. Sur ces cinq dernières années, l'entreprise a augmenté son dividende sur un rythme annuel moyen de près de 5%.
Résultats sur le long terme
Tout comme les dividendes, les bénéfices, la valeur des actifs et les réserves de liquidités progressent sur le long terme. Ceci prouve la solidité du modèle d'affaires d'Intel. L'entreprise parvient à créer de la valeur pour ses actionnaires et ceci se ressent sur le titre qui a plus que doublé ces dix dernières années. Il convient toutefois de relever que la performance boursière d'INTC se situe bien en deçà de celle du marché sur la même période. Le S&P a ainsi progressé deux fois plus vite et le Nasdaq pas loin de quatre fois plus. Les dividendes versés compensent certes en en partie cette relative sous-performance, mais cela n'explique pas tout. Nous verrons un peu plus loin les raisons de ce décalage.
Les réserves de liquidités
On l'a déjà en partie compris grâce aux ratios de valorisation, l'argent coule à flots sur les comptes du géant américain des semi-conducteurs. L'entreprise possède donc des réserves abondantes (sans toutefois se révéler excessives), avec un current ratio de 1.91 (en forte hausse par rapport à l'exercice précédent). Le quick ratio n'a pas à rougir non plus, avec 1.57. Sans surprise, Intel possède une marge plus que confortable pour honorer ses factures et éviter le défaut de paiement.
Profitabilité et rentabilité
Nous l'évoquions déjà en première partie, Intel possède une profitabilité indiscutable. La marge brute s'élève ainsi à 56% (en légère baisse toutefois). La marge de free cash-flow et la marge nette sont tout simplement bluffantes, avec près de 27% chacune. Pour ce qui est de la rentabilité, le tableau peut se décrire de manière quasi identique. Le ROA flirte ainsi avec les 14% (là aussi en légère baisse), tandis que le CFROA grimpe jusqu'à 23% et le ROE même jusqu'à près de 26% (malgré un assez faible endettement).
Des ratios de profitabilité et de rentabilité pareils ne se rencontrent pas tous les jours. On verra un peu plus loin ce qui peut les expliquer.
Endettement
Nous en parlions avec la valeur d'entreprise, la structure du capital d'Intel repose relativement peu sur la dette. L'endettement représente ainsi 0.45 fois les fonds propres. Par rapport aux actifs, la dette à long terme se monte à près de 22% (en hausse). Ceci peut paraître important, mais, grâce à son free cash-flow abondant, Intel serait capable d'amortir l'intégralité de sa dette en moins de trois ans.
Rendement pour les propriétaires de l’action Intel
Malgré un endettement global correct, l'émission de dette nette a représenté, sur ces cinq dernières années, un rendement négatif pour l'actionnaire de -0.4%. En revanche, sur le même laps de temps, l'entreprise a régulièrement réduit son nombre d'actions en circulation, provoquant un rendement positif pour l'actionnaire de 2.8%.
Avec le dividende, le rendement total pour les actionnaires d'Intel a ainsi représenté sur ces cinq dernières années un joli 4.6%. L'entreprise a utilisé 81% donc FCF pour le faire. Elle devrait donc continuer à pouvoir assurer une générosité similaire pour ses propriétaires dans le futur, sans pouvoir toutefois considérablement l'augmenter.
Oligopole et barrières d’entrée
Comment parler d'Intel sans évoquer sa situation oligopolistique. Les micro-processeurs d'Intel équipent en effet les 3/4 des PCs vendus chaque année à travers la planète. L'entreprise américaines fait certes face à quelques opposants, comme AMD sur le marché des PCs ou Samsung, mais elle possède de très nombreux avantages concurrentiels, non seulement par rapport à ces adversaires directs connus, mais surtout par rapport à tout nouvel arrivant sur le marché.
Le domaine des semi-conducteurs se caractérise en effet par une nécessité de demeurer à la pointe de la technologie, tout en s'appuyant sur des moyens de production très importants et un vaste réseau de distribution. Intel investit constamment pour maintenir ces éléments sous contrôle, ce qui se caractérise par des frais de R&D très importants et, de manière plus générale, des dépenses élevées en capital.
Le processus de fabrication nécessite des centaines d’étapes dans des « salles blanches », avec un air d'une pureté quasi parfaite. La construction d’une seule usine coûte plusieurs milliards de dollars. Intel est une des rares sociétés qui fabrique ses produits avec ses propres installations, ce qui lui permet de maintenir la qualité sous contrôle et d'assurer l'approvisionnement. Grâce aux économies d'échelle et à l'intégration verticale, Intel peut également introduire de nouveaux produits sur le marché à un rythme très rapide. Peu d’entreprises possèdent les ressources financières nécessaires pour concevoir, fabriquer et distribuer ces produits de très haute technologie. Les barrières d'entrée dans cette industrie sont donc énormes. Même si un concurrent y arrive, il doit encore pouvoir maintenir le rythme très élevé du renouvellement des générations des puces. Les bonds technologiques sont constants et importants.
Franchise
À ces freins financiers, technologiques et logistiques, s'ajoutent la notoriété de la marque Intel, la dépendance et la fidélité de ses clients, ainsi que son portefeuille de propriété intellectuelle. Le fabricant américain de puces électroniques possède donc les qualités d'une franchise, concept cher à Warren Buffett. Au niveau financier, cela se traduit par :
- une marge brute moyenne sur ces cinq dernières années très importante (59.7%)
- une marge nette moyenne sur la même période élevée (25.7%)
- des frais généraux moyens sur la même période relativement bas (16.9%)
- un goodwill en hausse
- un ratio dette / fonds propres correct (0.45)
Si le milliardaire américain ne possède pas d'actions Intel actuellement c'est peut-être notamment à cause des dépenses en capital importantes nécessaires au développement de l'entreprise. Celles-ci sont en effet représenté 76.2% du bénéfice moyen sur ces cinq dernières années. C'est peut-être aussi par rapport à certaines incertitudes liées au marché des PCs .
Risques et opportunités pour I’entreprise Intel
Le monde de l'informatique a considérablement évolué ces vingt dernières années. À l'époque, informatique rimait avec PC. Aujourd'hui, ceux-ci se retrouvent noyés parmi l'offre pléthorique d'écrans de toutes sortes, tablettes, smartphones, smart TV et autres appareils connectés. Quand le marché des PCs se retrouve à la traine, Intel en pâtit également. La tendance vers les appareils mobiles n'est pas près de s'arrêter, bien au contraire. On peut voir, dans ce changement des habitudes de consommation, un des éléments qui explique la relative sous performance du titre par rapport au marché durant ces dix dernières années.
Toutefois, Intel possède des reins solides et la faculté de se renouveler. Elle s'appuie pour ce faire de plus en plus vers les processeurs dédiés aux centres de données, dont le marché est en pleine croissance et qu'elle domine également. Elle s'oriente aussi vers les marchés prometteurs de l'intelligence artificielle, de l'Internet des objets et des voitures sans conducteurs. Dans la même trempe, Intel s'est lancée depuis peu dans la production de cartes graphiques pour concurrencer AMD et Nvidia. Ce marché est actuellement totalement asséché par la demande monstrueuse liée au minage des cryptomonnaies. Il y a donc assurément un coup à jouer pour la société américaine sur ce segment.
Risques de l’action Intel
Comme toujours il est difficile (et futile) d'établir des scénarios à trop long terme par rapport au développement d'une entreprise et de son industrie. Nous constatons que son marché est en cours de transformation, mais qu'Intel a les moyens d'y faire face. On ne peut pas parler ici de virage technologique, mais plutôt de modification dans les habitudes des consommateurs et de réorientation vers certains marchés. Un scénario à la Kodak semble donc peu probable.
Ce que l'on sait actuellement en revanche, c'est qu'Intel est une entreprise très solide financièrement. On l'a vu avec ses réserves de liquidités et son relatif faible endettement. Ceci se confirme également avec le score d'Altman, de 3.55, situant le géant américain dans la zone "verte". Le risque de faillite est donc minime. Le score de Piotroski, avec cinq points, confirme certes que l'entreprise n'est pas en danger, mais traduit tout de même quelques difficultés, en tout cas passagères. Nous avons déjà évoqué une petite baisse de la profitabilité et de la rentabilité par rapport au dernier exercice. Nous avons aussi parlé de l'augmentation de l'endettement, même s'il demeure à un niveau correct.
Momentum et volatilité de l’action Intel
Ces derniers éléments apportent encore un nouvel éclairage sur la difficulté du titre à réellement décoller depuis plusieurs mois, voire années. Le momentum récent de l'action Intel n'est d'ailleurs pas extraordinaire, négatif sur les six derniers mois et positif sur les douze derniers mois, mais bien en-deçà du marché.
La volatilité de l'action se monte à 33% sur ces derniers douze mois, ce qui reste assez raisonnable pour un titre "techno". Encore mieux, le bêta n'est que de 0.6, ce qui signifie que le titre est assez peu sensible aux variations du marché, ce qui est rare pour une entreprise de ce type.
Institutionnels
Intel, avec une capitalisation de 217 milliards de dollars, figure parmi les mastodontes du S&P 500, en 31e place. Les institutionnels s'y bousculent, avec notamment BlackRock, Dimensional Fund Advisors, Norges Bank, Capital Research & Management, SSgA Funds Management, Vanguard, Amundi, Fidelity, etc. Ceux-ci possèdent des informations de nature privilégiée et des ressources qui les favorisent au détriment des petits investisseurs. Par ailleurs, si les institutionnels se mettent à sortir du titre, la volatilité baissière pourrait devenir très importante.
Conclusion
Pour un titre de cette qualité et de ce calibre, INTC se négocie à un prix attractif. Elle offre également un rendement généreux. L'entreprise est rentable, profitable et solide, même si elle traverse quelques turbulences, liées à des changements dans les habitudes de consommation. Elle possède des avantages concurrentiels importants, notamment en termes de R&D, de fabrication et de notoriété.
Pour des investisseurs buy & hold, en quête de rendement et plus-value, Intel se révèle assurément être une jolie opportunité par les temps qui courent. Personnellement, je la trouve toutefois trop grande et trop exposée aux institutionnels. Le momentum de ces derniers mois ne m'incite pas non plus à passer à l'action.
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Avec la baisse d’aujourd’hui, t’en penses quoi?
Toujours pareil. Dans une perspective buy & hold, pourquoi pas. En revanche, cette nouvelle baisse dégrade encore plus le momentum. À court/moyen terme ça risque donc d’être un peu chahuté.
Le problème c’est que si une action tech est peu cher.. c’est qu’en général qu’il y a anguille sous roche. Depuis des années AMD est entrain de prendre des parts de marché à INTC sur les marché des CPU. Il semblerait que ce trimestre à confirmé cette tendance au vu du comportement des deux actions.
L’énorme avantage concurrentiel de INTC à vraiment diminué.
Ça ne veut pas dire que c’est une mauvaise compagnie, de loin pas!, ou qu’on ne peut pas gagner de l’argent avec du temps, le secteur a une croissance énorme dans le futur, mais ce n’est plus le quasi monopole qu’on connaissait dans le passé.
Dans le genre solide et qui distribue des coupons avec une marge certaine, mais aussi sous attaque de la concurrence, mais à un degré moindre me semble-t-il, CSCO est un classique dans les fonds dividendes que j’avais regardé pour trouver qq idées. Par contre ce n’est pas un stock qui rentre dans des critères de « value ».. acheter de la tech « value » qui se comporte comme de la tech (beta et sur performance) est quasi impossible dans ce marché il me semble. Entre la liquidité et la capacité ahurissante des mégas companies de continuer à avoir une croissance qui défie la gravité il va falloir être patient.
En général, oui, mais pas toujours. Il y a des exemples et contre-exemples emblématiques. Dans ceux qui correspondent à la règle, il y a évidemment Kodak, un géant de l’époque, qui figurait même dans l’indice Dow Jones, et qui a fait faillite après avoir raté le virage technologique de la photo numérique. Dans les contre-exemples, il y a Apple, qui affichait un PE ratio de 13 en 2018 et dont le cours a triplé depuis. IBM est un autre contre-exemple de légende. La société a failli disparaître plusieurs fois en un peu plus d’un siècle. Elle a eu plusieurs vies ! Mais tu as raison de souligner qu’avec les technos, les avantages concurrentiels peuvent très rapidement se retourner, parfois même contre la société qui les possède.
Merci de parler de CSCO, c’est une vielle connaissance, puisque j’en étais l’actionnaire malheureux et naïf durant la bubble tech ! Je constate qu’elle n’a toujours pas rattrapé d’ailleurs ces niveaux de folie d’antan. Actuellement, elle est certes meilleur marché que la plupart des autres techs, mais quand même assez cher d’un point de vue value (plus en tout cas que INTC, mais avec un bien meilleur momentum). Effectivement, comme tu le soulignes, acheter de la tech value est impossible actuellement, à cause des taux d’intérêts quasi-nuls. Mais au vu du retour de l’inflation, la donne pourrait changer dans le futur…
Salut, depuis 6 mois Intel fait du sur-place, voire même est sur un petit canal descendant. C’est vraiment décevant comme performance pour une techno, mais bon si on cherche les dividendes pourquoi pas… Qu’est-ce qui pourrait faire décoller cette action?
Salut Lud,
Il y a plusieurs éléments qui expliquent cette mauvaise performance :
– tendance baissière du marché à cause de la guerre en Ukraine et de la hausse des matières premières. Cette dernière était déjà présente avant la guerre, un peu à cause du Covid, mais surtout à cause d’une politique hyper-expansionniste et de longue durée des banques centrales… Cette tendance s’est toutefois nettement accélérée avec la guerre, qui agit ici comme un catalyseur.
– anticipation d’une hausse des taux, à cause de l’inflation précitée. Les technos sont particulièrement exposées à une hausse des taux. Pour Intel, cela a une petite influence, mais heureusement l’entreprise est peu endettée. Il y aura une pression négative sur le cours à court/moyen terme. Sur le plus long terme cela peut créer des opportunités d’achat car les fondamentaux ne devraient pas trop en souffrir.
– momentum baisser, comme je le disais déjà dans l’article. Les cours ont une fâcheuse tendance à continuer à se comporter comme ils le faisaient dans le passé. Même remarque que ci-dessus : mauvais pour le court/moyen terme, avec des opportunités sur le plus long terme.
Donc je ne suis pas devin, je ne sais pas ce qui va la faire décoller. Faut juste être un peu patient, laisser passer l’orage, enfin plutôt le cyclone, et se tenir prêt.
-8% vendredi passé, comme quoi il ne faut jamais jouer contre la tendance…
Le prix devient archi-intéressant, mais je garde la même ligne de conduite : laissons passer le cyclone d’abord