Journal d’un futur rentier (79)

Cette publication est la partie 78 de 86 dans la série Journal d'un futur rentier.

C'est drĂ´le comme on oublie vite la Rat Race. Quand on est dedans, on ne la voit plus parce qu'elle imprègne toutes les couches de notre Ăªtre. On se lève, on travaille, on consomme et on recommence. Elle est partout, autour de nous et au plus profond de nous. Elle est notre essence mĂªme. C'est seulement lors de brefs instants d'Ă©veil qu'on parvient Ă  saisir le cĂ´tĂ© vicieux de cette course que nous menons.

Quand on parvient enfin à s'en sortir, après des années de lutte, on la zappe très vite également. On change de paradigme. Il y a un avant et un après. Notre vie se retrouve modifiée de fond en comble. La course effrénée que nous menions nous semble bien infantile, pour ne pas dire stupide. C'est seulement lorsque nous sommes confrontés à des situations ou des gens qui nous rappellent notre existence précédente que nous en prenons conscience.

Ce matin par exemple, je me suis fait rĂ©veiller Ă  7h00 par un voisin qui Ă©tait en train de dĂ©gager la neige de sa voiture. Cela m'a fait sourire intĂ©rieurement en me rappelant l'article prĂ©monitoire "JournĂ©e d'un rentier". Neuf ans plus tard, j'y suis arrivĂ©. Incroyable. Je suis sorti de ce cirque. Certes, pas totalement. Je fais encore acte de prĂ©sence une vingtaine d'heures par semaine au travail et mĂªme un peu plus par temps de virus chinois. Mais dans ma tĂªte je ne suis dĂ©jĂ  plus lĂ . J'ai dĂ©connectĂ©.

LIRE  5 heures du matin : quand la fatigue cède la place Ă  la gratitude

La semaine dernière par exemple, j'Ă©tais en "visio" (je dĂ©teste le terme et encore plus le concept). Derrière mon Ă©cran, mon visage me reprĂ©sentait, tandis que tout le reste de mon Ăªtre, physique, psychique, spirituel attendait de pouvoir cliquer sur le bouton "Quitter la rĂ©union". J'ai remarquĂ© que c'Ă©tait encore plus facile de jouer la comĂ©die lorsqu'on pouvait juger en temps rĂ©el de notre performance grĂ¢ce Ă  la camĂ©ra. C'est sans doute le seul bon cĂ´tĂ© du virus. On pourrait aussi ajouter le masque qui nous permet aussi de nous "cacher" lors des sĂ©ances en "prĂ©sentiel" (je dĂ©teste tout autant le terme et lĂ  aussi le concept).

Autant les sĂ©ances "classiques" sont chiantes, autant les "visios" sont mortelles. Les Ă©changes sont difficiles et peu conviviaux. La prise de parole se concentre très souvent sur un nombre très restreint de personnes. Parfois mĂªme une seule. En Ă©tant hors du contexte du travail, les sujets de discussions paraissent encore plus dĂ©nuĂ©s de sens. Je suis toujours effarĂ© par l'intĂ©rĂªt et l'engagement de certaines personnes lors de ces Ă©vènements. On dirait que leur vie en dĂ©pend. D'un cĂ´tĂ© c'est peut-Ăªtre cela (ce qui va dans le sens du premier paragraphe).

Ces petits évènements me rappellent au bon souvenir de la Rat Race et je m'en amuse aujourd'hui. Désormais je prends mon pied avec ma petite activité accessoire indépendante qui prend lentement mais sûrement son envol. Les trois termes sont primordiaux : activité parce que je n'ai pas l'impression de travailler (bien au contraire, je m'amuse), accessoire parce que je veux la limiter à une dizaine d'heures par semaine et indépendante, parce que je suis mon seul patron.

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17 rĂ©flexions sur “Journal d’un futur rentier (79)”

  1. Pour ma part je prĂ©fère de loin les confĂ©rences tĂ©lĂ©phoniques aux confĂ©rences vidĂ©o: ça permet au moins de suivre la bourse pendant que les autres perdent leur Ă©nergie Ă  dĂ©battre de la taille optimale des marges du PV…

    Question: comme tu fais encore acte de prĂ©sence au travail mais que ta tĂªte n’y est plus vraiment, est-ce que les journĂ©es n’y sont pas encore plus longues et barbantes?

    1. ça permet au moins de suivre la bourse pendant que les autres perdent leur énergie à débattre de la taille optimale des marges du PV

      mort de rire

      comme tu fais encore acte de prĂ©sence au travail mais que ta tĂªte n’y est plus vraiment, est-ce que les journĂ©es n’y sont pas encore plus longues et barbantes?

      oh que oui et c’est pour cela que j’ai hĂ¢te d’en finir
      c’est un peu la mĂªme impression que lorsque tu pars en vacances… la dernière semaine de travail semble interminable

      1. Faut pas dĂ©conner. C’est super important la marge du PV! đŸ™‚
        J’adore zoom.. ça permet de faire d’autres choses (après avoir dĂ©fini cette marge de PV on est bien d’accord) comme lire cet article par exemple…

    2. Philippe de Habsbourg

      Personnellement, que je sois par tĂ©lĂ©phone ou que ma camĂ©ra soit activĂ©e, je ne me gĂªne pas pour regarder les dernières envolĂ©es boursières, l’actualitĂ© sportive ou jouer aux Ă©checs. Franchement, je n’ai pas besoin de voir la face de mon boss et de mes collègues pour Ă©couter des discussions interminables, mĂªme quand je dois intervenir.

      Mon bĂ©bĂ© va naitre en juin et après mon congĂ© de paternitĂ©, j’ai le droit de prendre une annĂ©e sabbatique. Ce sera donc un peu plus d’un an, loin du boulot, que je vais avoir l’occasion de passer Ă  m’occuper de la famille, mais aussi Ă  m’occuper de mon entrainement et mes projets personnels. J’aimerais quand mĂªme avoir un petit job pour le plaisir. Messager Ă  vĂ©lo ça me plairait bien, surtout que je vais Ăªtre une bonne partie de mon temps dans une ville que j’adore : Francfort. Ça travaillerait mes jambes et ce serait un bon moyen, je pense, d’amĂ©liorer mon allemand!

  2. Après il y a un aspect que tu ne prends jamais en compte : le fait que parfois peut-Ăªtre une personne aime son travail đŸ™‚ je lis rĂ©gulièrement tes articles sur ce que tu appelles la rat race et le fait que tu cherches a changer de vie, je suis moi mĂªme quelqu’un dont le travail n’est pas la prioritĂ© n°1 (pourtant j’aime ce que je fais, je suis dans le jeu vidĂ©o (ubisoft) et j’aime mon taf), mes prioritĂ©s Ă©tant plutĂ´t ma famille et mes hobbies. Mais par contre je ne critique pas du tout ceux qui sont Ă  100% investis dans leur boulot, c’est une autre conception de la vie, ce n’est pas la mienne, mais je ne dis pas que ce n’est pas la bonne, qu’ils sont aveuglĂ©s, qu’ils ont tout faux et que j’ai raison.
    Je suis plutĂ´t d’accord avec ta conception de la vie en ce qui concerne le travail, mais je trouve par contre que tu manques un peu de tolĂ©rance

    1. J’en suis tout Ă  fait conscient et jamais je ne me permettrais d’Ăªtre intolĂ©rant par rapport Ă  ceux qui aiment leur job. Ils ont de la chance et c’est aussi ce que je recherche Ă  travers ma petite activitĂ© accessoire. J’y prends mon pied. Je comprends Ă  100% une personne comme toi qui fais un job de toute Ă©vidence passionnant et pour moi cela n’est pas de la Rat Race. Ton job est une passion pour laquelle tu es payĂ©. Que demander de mieux. Ce que je critique c’est la façon dont fonctionne de plus en plus le monde de travail actuellement, qui justement enlève tout sens Ă  nos actions. L’accumulation des sĂ©ances, des visioconfĂ©rences, des procĂ©dures, des audits, etc. Cela dĂ©nature totalement le job que l’on a choisi Ă  la base. Perso, j’ai besoin de pouvoir sentir Ăªtre utile et/ou rĂ©aliser des choses palpables. Pas de disserter durant 3h sur l’article x.x.x d’un règlement ou d’une procĂ©dure. Et c’est peut-Ăªtre par rapport Ă  ce point en particulier que je suis plus intolĂ©rant, par rapport Ă  certaines personnes. Je le reconnais.

      1. Je suis parfaitement d’accord avec Psycoke, en ce sens que l’on peut aimer -ou non- son travail (l’activitĂ© en elle-mĂªme, la structure [entreprise ou autre organisation], les valeurs de celles-ci, ses Ă©ventuels collègues, chefs, subordonnĂ©s, clients, fournisseurs, les rencontres, la solitude, les Ă©ventuels dĂ©placements ou autre voyages, les moyens mis Ă  disposition, etc.), qu’il soit ou non une prioritĂ© dans sa vie.

        Toutefois, mĂªme si l’on aime son travail ou certains Ă©lĂ©ments de celui-ci, il est sans doute difficile d’en imaginer sans certaines contraintes ou certains inconvĂ©nients, de quelque nature que ce soit, dont on se passerait. Le travail idĂ©al, sans contrainte ni inconvĂ©nient, n’apportant que satisfaction et Ă©panouissement, n’existe probablement pas ou doit Ăªtre rare. Le tout est de trouver le travail qui, une fois tout bien balancĂ© et pondĂ©rĂ©, penche plutĂ´t du cĂ´tĂ© positif que du cĂ´tĂ© nĂ©gatif. Et un travail qui plaĂ®t Ă  un moment T peut Ăªtre moins attrayant Ă  un moment T+x, si des paramètres de l’Ă©quation changent -que ce soit en raison de facteurs endogènes ou exogènes- ou par une lassitude s’installant avec le temps.

        Je relève par ailleurs que l’apprĂ©ciation d’un travail n’est pas universelle et dĂ©pend d’un individu Ă  l’autre. ce qui plaĂ®t Ă  certain dĂ©plaĂ®t Ă  d’autres. Et je dirais que c’est tant mieux.

        Sans avoir relu tout ce que JĂ©rĂ´me a Ă©crit, je n’ai pas l’impression qu’il critique les gens impliquĂ©s consciemment ou non dans la « Rat Race » (finalement, qui ne l’est pas en tout ou partie) mais un système et les individus qui le mette en place, s’en servent dans la poursuite de leurs intĂ©rĂªts ou le rende insensĂ©. JĂ©rĂ´me confirmera, ou non.

        Le paradoxe est que pour sortir (mais peut-on en sortir totalement?) de la « Rat Race », il faut l’utiliser. Comment sont produits les bĂ©nĂ©fices, qui permettent de crĂ©er de la valeur et verser des dividendes (y compris au profit des acteurs de la Rat Race, qui comptent au moins sur leur caisse de pension, leur rente de retraitĂ©, leur assurance vie, etc.) ? Sortir plus ou moins de la « Rat Race » n’est possible que si celle-ci existe (belle lapalissade).

      2. mais un système et les individus qui le mette en place, s’en servent dans la poursuite de leurs intĂ©rĂªts ou le rende insensĂ©

        C’est exactement cela, comme je l’expliquais dans ma dernière rĂ©ponse. C’est ce mĂ©lange d’aliĂ©nation du travail et de dĂ©personnification des tĂ¢ches qui m’a usĂ© Ă  la longue. C’est le système que je regarde d’un oeil critique en premier, mais ce système est lui-mĂªme portĂ© par certains individus.

        Le paradoxe est que pour sortir (mais peut-on en sortir totalement?) de la « Rat Race »

        Tout juste. J’en parlais dĂ©jĂ  il y sept ans (c’est fou comme ça passe vite!) : https://www.dividendes.ch/2013/11/le-chemin-schizophrene-de-lindependance-financiere/

  3. J’ai la chance de ne pas avoir un mĂ©tier oĂ¹ les palabres interminables et insensĂ©es ne sont pas monnaie courante.

    Mais quand je lis comment JĂ©rĂ´me, Dividindes et bien d’autres personnes dĂ©crire (caricaturer?) les confĂ©rences et tĂ©lĂ©confĂ©rences professionnelles, je me dis que les structures des entreprises ou autres organisations ont encore un beau potentiel d’amĂ©lioration de leur efficience! Que d’heures de travail gaspillĂ©es, semble-t-il!

    Pour ma part, j’ai un souvenir qui me revient maintenant. Il y a une dizaine d’annĂ©es voire un peu plus, j’ai assistĂ© Ă  une confĂ©rence rĂ©unissant une dizaine de personnes dans les locaux d’une grand entreprise multinationale. Les participants Ă©taient tous employĂ©s de cette entreprise, sauf moi et une autre personne. Au final, 3 personnes -pas moi- avaient monopolisĂ© la parole, les autres Ă©coutant, l’air attentifs, en prenant quelques notes. Le temps m’avait paru long. Celui qui dirigeait la sĂ©ance a tenu le rythme pendant 2 (ou 3?) heures, avant de la lever Ă  midi pile (!) et d’inviter tout le monde Ă  une excellente table du restaurant maison rĂ©servĂ© aux grandes occasions et aux « gradĂ©s ». Je me rappelle m’Ăªtre fait la rĂ©flexion que le meneur de sĂ©ance avait fait preuve d’une grande maestria pour tirer l’air de rien la sĂ©ance en longueur jusqu’Ă  l’heure du repas. du grand art.

    1. Des exemples comme ceux-lĂ  je pourrais t’en citer Ă  la pelle. Oui c’est de la maestria, mais quel temps perdu et quel ennui !!! Aujourd’hui ce genre de sĂ©ances plombent une grosse partie des cahiers des charges de bon nombre d’employĂ©s. Le reste du temps Ă©tant dĂ©volu Ă  traiter les centaines de courriels qui tombent inlassablement…

  4. Philippe de Habsbourg

    Ouais đŸ™‚ Merci!

    Que penses-tu des nombreuses bulles qui Ă©clatent un peu partout ? En AmĂ©rique en tout cas. GameStop, Nokia, Blackberry, AMC? Je pense que de « simples adolescents » sont en train de gĂ©nĂ©rer une certain panique au sein de quelques institutions financières et c’est tant mieux pour eux! Je trouve ça vraiment drĂ´le. Mais je pense que ça provoque une certaine fĂ©brilitĂ© sur l’ensemble du marchĂ© aussi…

    1. Je pense qu’on est revenus en 2000. Je ne sais pas si tu as connu cette pĂ©riode mais c’Ă©tait comme aujourd’hui. Le mĂªme genre de titres qui font des pertes et qui explosent. C’est rigolo d’ailleurs que Nokia revienne sur le devant de la scène. C’Ă©tait un des titres chauds de l’Ă©poque. Il y avait aussi « Palm » qui Ă©tait hautement spĂ©culatif et qui a très mal fini, remplacĂ© par Blackberry justement… La planète finance a la mĂ©moire bien courte. Comme tu dis, ce sont de simples « ados », en tout cas dans la tĂªte.

      On peut mettre aussi Tesla avec. Et bien d’autres.

      Reste Ă  savoir si c’est le signe (enfin) qu’on est Ă  la fin d’un marchĂ© haussier historique, comme en 2000. Depuis le temps que j’attends ceci, je n’ose mĂªme plus l’espĂ©rer…

  5. Je suis aussi d’accord avec Psycoke et avec JĂ©rome ! Pour certaines personnes le boulot peut Ăªtre source de plaisir mais il y a une course pour « faire plus avec moins » qui est dans certains cas dĂ©testable et engendre des consĂ©quences ahurissantes (santĂ© et environnements) que mĂªme des sociĂ©tĂ©s hyper Ă©voluĂ©es laissent faire. No comment.
    L’homme est un loup pour l’homme… « La première occurrence de cette locution se trouve chez Plaute, dans sa comédie Asinaria (La Comédie des Ânes, vers 195 av. J.-C, « source Wikipedia. Il y a 2000 ans Plaute avait tout compris !
    Bon j’arrĂªte pour la philosophie lol.

    Pour la situation actuelle je vois une superposition d’éléments différents.
    Suite logique de l’évolution du QE : Après les prĂªts (QE) et les taux d’intĂ©rĂªt zĂ©ro, les achats d’obligations d’entreprises je vous prĂ©sente, Ă  degrĂ© divers et variĂ©s, les dons (fiscaux).. financĂ© par le QE on est bien d’accord. Et pour l’instant pas d’inflation Ă  l’horizon donc pas de raisons d’arrĂªter ces mĂ©canismes. On est en train de d’explorer gentiment mais surement le MMT. Ca va Ăªtre difficile d’arrĂªter les vannes de l’argent facile ou gratuit. Malheureusement pour les Ă©pargnants car en plus de pas de rĂ©munĂ©rations sur l’Ă©pargne la porte de sortie logique (Ă  moyen ou long terme) devrait Ăªtre de l’inflation.

    Les short squeeze sont liĂ©s aux chèques que les amĂ©ricains reçoivent, Ă  la dĂ©mocratisation du trading gratuit et les moyens de communication de masse. C’est certains qu’il y a des bulles dans ce marchĂ© mais la situation est quand mĂªme très diffĂ©rente du nasdaq en 2000 car les compagnies Tech font de l’argent (et en quantitĂ© !!). Des shorts squeeze on en a dĂ©jĂ  eu dans le passĂ© et certains très importants. Ce n’est pas nĂ©gligeable, des milliards se perdent mais j’espère que ça va rester un Ă©piphĂ©nomène pour les investisseurs et que ce sera essentiellement les HF et autres intervenants qui shortent qui vont souffrir ces attaques.

    1. Toutes les entreprises tech ne font pas de l’argent. Celles mentionnĂ©es plus haut justement en perdent (Nokia, Blackberry…). Tesla c’est de l’automobile mais je la mets aussi dans le camps des techs spĂ©culatives car c’est une nouvelle technologie. Et comme tu le dis, ce sont les politiques accommodantes des banques centrales qui subventionnent le tout. Je suis d’accord avec toi, l’inflation va revenir Ă  plus ou moins long terme. Et lĂ , ceux qui faisaient tout juste des bĂ©nĂ©fices, vont s’Ă©crouler. Donc je continue Ă  penser qu’il y passablement de similitudes avec 2000. La seule diffĂ©rence notable ce sont les taux zĂ©ro ou nĂ©gatifs qui agissent comme un retardateur de crise. Ils traitent les symptĂ´mes, mais pas les origines du mal.

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