J’aime l’impopularité

Il y a une année, je devais interrompre les services payants de ce site, à cause d'un changement chez mon fournisseur de données, un géant américain pour ne pas citer son nom. La fin des services payants aurait dû booster l'audience du site, puisque je fournissais depuis lors des analyses gratuites de sociétés. Pourtant, c'est exactement le contraire qui s'est produit et paradoxalement j'en suis presque content. Cela vous étonne ? Alors lisez la suite...

Depuis l'année passée, j'ai en effet également changé ma ligne éditoriale et ma stratégie d'investissement. J'ai abandonné les grosses capitalisations américaines, hors de prix, pour me réorienter vers des petites sociétés très peu suivies par la masse des investisseurs. Quand on parle de Coca-Cola (KO:NYQ), on attire évidemment bien plus de lecteurs que lorsqu'on analyse BVZ (BVZN:SWX). La plupart des gens sont obnubilés par le succès des géants de la bourse et sont prêts à payer un prix scandaleux pour s'en payer une tranche. Au contraire, ils craignent de s'aventurer dans des petites sociétés, aussi profitables soient-elles.

En procédant de la sorte, ils passent à côté d'une quantité gigantesque d'opportunités. Si l'on s'amuse à faire une petite recherche des sociétés cotées à travers le monde, on constate que :

  • Les big caps ne représentent que 9% du nombre total d'entreprises
  • Les micro et nano caps représentent 47%
  • Si l'on ajoute les small caps aux deux citées ci-dessus, on arrive même à 70%.

En se focalisant seulement sur les grosses sociétés, on laisse donc totalement de côté neuf entreprises sur dix. Pire, on entre en plein dans le monde suivi et investi à outrance par les analystes, les institutionnels et les ETFs. Vous jouez dans la cour des grands et vous vous mesurez à des acteurs qui ont beaucoup plus de moyens que vous.

Les ETFs sont devenus très populaires et ils ont indéniablement permis à beaucoup de petits investisseurs de placer leur argent en bourse en ayant suffisamment de diversification, sans trop de frais. De plus, en étant pondérés par la valeur du marché, ils assurent que les titres qui les composent suivent un momentum positif, ce qui explique leur succès et le fait qu'ils fassent mieux qu'une très large majorité d'investisseurs.

Néanmoins, les ETFs ont également introduit un biais dangereux en faveur des grosses entreprises. Tandis que ces dernières sont littéralement sous perfusion, faisant grimper les prix à des sommets historiques, quels que soient les résultats, les plus petites entreprises sont totalement oubliées. Il existe des dizaines et dizaines de milliers de micro et nano caps très profitables et très bon marché à travers le monde. Ce serait vraiment dommage de passer à côté. Les institutionnels ne peuvent tout bonnement pas s'y aventurer car ils ont paradoxalement trop d'argent à investir! C'est comme si vous demandiez à un milliardaire de dépenser tout son argent en achetant des petits pains...

Si l'on regarde les valorisations qui sévissent parmi les entreprises cotées à travers le monde :

  • 22% des big caps se négocient à un ratio prix/ventes inférieur à 1
  • 38% des micro et nano caps s'échangent à un ratio prix/ventes inférieur à 1.

Il y a donc un pourcentage d'entreprises bon marché qui est presque le double parmi les toutes petites entreprises que parmi les toutes grandes. Vu que le nombre de micro et nano cap sont nettement plus nombreuses que les big caps, il y a même près de sept fois plus d'entreprises bon marché parmi les toutes petites que parmi les grandes.

Quand je vois que mon blog végète autour des 50'000 pages vues par mois, tandis que les deux gamins stars Swan et Neo arrivent à 311'000 abonnés rien que sur leur compte Instagram, je me dis que ce n'est pas la génération suivante qui va changer quoi que ce soit à cette constante de la bourse : malgré tout ce que nous raconte la théorie des marchés efficients, nous, femmes et hommes, restons fondamentalement humains. Nous sommes attirés par ce qui est populaire (et pas forcément très subtil). Cela n'a même sans doute jamais été aussi vrai.

Mais les modes changent. Elles changent même très vite. Celui qui arrive à rester en dehors de la meute possède donc un avantage conséquent : il ne risque pas de se retrouver embourbé dans des histoires dont plus personne ne veut entendre du jour au lendemain. Au contraire, il se pourrait même que ce qui était impopulaire soit soudainement porté aux nues par la foule. Pour l'investisseur contrarian, c'est le moment de réaliser de jolis profits et de prendre la poudre d'escampette.

Mon audience a été divisée par deux en l'espace de seulement un an. Pourtant dans la même durée, et comme je le montrerai prochainement au bilan du premier semestre 2018, ma performance par rapport au marché est excellente. Je n'ai pas l'impression non plus que les articles soient moins intéressants que par le passé. Au contraire, grâce à dividinde, le blog s'est enrichi d'une vue complémentaire, plus orientée sur le marché suisse. Rien ne justifie donc une telle désertion, si ce n'est que les sujets choisis et titres analysés intéressent nettement moins de monde.

Nombre de pages vues en baisse, revenus publicitaires en baisse, qu'importe. De toute façon ce n'est pas avec l'argent de poche misérable qu'on reçoit pour les annonces sur Internet qu'on risque un jour de faire fortune. L'important c'est bel et bien de miser sur les bons chevaux. Inutile de dire que ce n'est pas avec ceux qui ont la plus petite cote (donc les plus populaires) qu'on gagne le plus...

Voilà pourquoi je me réjouis d'avoir moins de lecteurs. Les plus fidèles d'entre vous apprécieront aussi.

 

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17 réflexions sur “J’aime l’impopularité”

  1. Laurent Martin

    J’en profite pour vous remercier de manière générale pour votre site, vos articles et vos analyses. Je les lis toujours avec grand intérêt.

    Concernant l’article ci-dessus, je note que l’instinct grégaire concerne l’homme également, y compris l’investisseur. En matière boursière, faire la même chose que les autres en suivant la tendance peut être un avantage si l’on mise avant tout sur les gains en capitaux (à condition de sortir avant que la tendance s’inverse violemment!). Pour celui qui cherche surtout des dividendes, l’intérêt est plutôt d’être contrarian, en trouvant des verseuses de dividendes à bon marché, et par conséquent des valeurs délaissées pour une raison ou pour une autre par la masse des investisseurs; parmi ces valeurs, il y a les petites valeurs qui n’intéressent pas grand monde et dont le cours n’augmente pas ou peu, d’une part, et de grosses valeurs établies et reconnues qui deviennent bon marché suite à un mouvement général de repli boursiers. Si on arrive à mettre la main sur ces grosses valeurs verseuses de dividendes après qu’elles aient été exagérément « massacrées » dans un mouvement de panique, c’est le top, car on a alors une valeur qui non seulement versera des dividendes mais qui permettra en outre un gain en capital appréciable.

    Pour ma part, le Graal, c’est la bluechip verseuse de dividendes qui est massacrée lors d’un mouvement boursier négatif plus ou moins violent. Ne miser que sur le dividende est sans doute une bonne stratégie, mais j’aime bien les gains en capitaux, notamment parce qu’il sont avantageux fiscalement.

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      Merci Laurent. Les grosses valeurs qui paient des dividendes généreux (et de qualité) ont malheureusement disparu des écrans depuis bien longtemps.
      Mais un retour de manivelle va forcément arriver, tôt ou tard. A ce moment là, on sera tous comme des gamins dans un magasin de jouets, comme en 2009!

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    Philippe de Habsbourg

    Moi je vous lis souvent! J’aime votre manière de penser et d’aborder la vie face à cette société. Vous me faites voir la vie différemment et pas juste par rapport au cash… Le journal du rentier me manque par contre.
    Longue vie à ce site! Longue vie à la Suisse!

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    Merci Philippe. Pas de crainte à avoir concernant le journal du rentier, il est toujours en cours et un prochain post est prévu tout prochainement. Les articles se sont espacés parce que les choses sont restées relativement stables dans ma vie ces derniers temps. Mais c’est déjà en train de changer…

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    Hello Jerome , on peut tres bien lire tes messages directement dans sa propre boite mail et sans pour autant venir sur le site ,,, est ce quantifiable ? en tous cas cela peut expliquer la baisse de frequentation ,,, et n’oublions pas que psychologiquement , nombre de produits « pas assez chers » se vendent mal ou pas ,,,,lol

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      Le mode de lecture n’explique pas cette baisse.
      Tu as raison. Les gens sont attirés par ce qui brille. Je vais mettre des diamants en fond d’écran! Lol

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    C’est toujours avec plaisir et intérêt que je vous lis.
    Continuez à partager si cela vous apporte toujours quelque chose car pour nous c’est le cas.

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    Bonjour Jerôme, juste pour vous dire que j’aime toujours lire vos articles. Il me font voir les choses sous un autre angle et j’apprends toujours quelque chose. Cet article sur l’intérêt d’investir là ou les autres ne vont pas est particulièrement intéressant! Et comme Philippe le dit au-dessus, j’ai hâte aussi de lire à nouveau le journal du rentier. Restez impopulaire, c’est ce qu’on aime chez vous 😉

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    Merci Jérôme pour ces belles paroles et ta capacité à penser hors des sentiers battus. Être contrarian et oser remettre en question l’establishment est pour moi une qualité plutôt qu’un défaut. C’est à mon avis même essentiel si on veut atteindre l’indépendance financière bien avant l’âge officiel de la retraite. Si tu fais tout comme tout le monde, tu prends ta retraite en même temps que tout le monde!

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    … et tous les jaloux diront: « Quelle chance ils ont d’être à la retraite si jeunes, alors que moi je dois bosser jusqu’à 65 ans. Pourquoi y ont-ils droit et pas moi? »

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    ANTONIO martins

    Bonjour Jérôme
    Merci pour tous les articles et la découverte des valeurs inconnues notamment du japon car c’est où la foule n’est pas encore qu’on peut faire du bon travail.
    Merci aussi pour la philosophie qui permet de sortir du consumérisme et de voir autrement la vie que par la seule possession des choses immédiates mais plutôt en construisant un objectif qui apporte l’indépendance à terme et alors de consommer si on le veut dans une grande aisance et selon notre envie.
    amicalement
    Antonio

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    Au fait , en parlant de fond d ecran et de diamants , ils ressortent bcp mieux avec un fond d ecran noir ,,, blague à part , un fond d ecran noir est bcp plus confortable pour les yeux ,,, je vais bcp moins sur etf replay depuis que la version free est en fond d ecran blanc ,,,, j ai meme l impression qu ils ont reservé le noir pour les abonnés payants ,,, lol

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