Article original rédigé par dividinde, mis à jour par mes soins en décembre 2025
Burkhalter Holding (BRKN) incarne l'une des plus belles réussites boursières suisses de la dernière décennie: +54% sur un an, un ROE de 57% qui pulvérise la concurrence, des scores financiers parfaits. Cette entreprise zurichoise d'installations électriques a transformé un secteur banal en machine à créer de la valeur pour ses actionnaires.

Mais en 2025, la question n'est plus "Burkhalter est-elle une bonne entreprise?" (réponse: oui, excellente), mais plutôt "à quel prix?". Avec un P/E de 25.5 et un payout ratio de 89%, les nouveaux entrants paient-ils trop cher cette qualité?
Un modèle de croissance par acquisitions ciblées
Burkhalter opère exclusivement sur le marché suisse des installations électriques. Sa stratégie repose sur trois piliers:
1. Acquisitions multiples de petites entreprises: Plutôt qu'un gros rachat risqué, Burkhalter a constitué un groupe de 45 PME locales. Cette approche décentralisée préserve les relations clients tout en mutualisant les ressources.
2. Sélectivité sur les contrats: L'entreprise privilégie systématiquement la qualité à la quantité. Résultat: une marge nette de 4.87%, soit 2x supérieure à la moyenne du secteur (2.26%).
3. Focus 100% Suisse: Pas de risque de change, visibilité maximale sur un marché stable qu'elle connaît parfaitement. Burkhalter représente environ 10% d'un marché encore très fragmenté.
Des indicateurs financiers qui impressionnent
ROE stratosphérique de 56.78%
Le retour sur capitaux propres de Burkhalter atteint 56.78% contre 10.38% pour l'industrie. Ce chiffre exceptionnel s'explique par trois facteurs:
- Marges nettes élevées (4.87% vs 2.26% pour le secteur)
- Rotation d'actifs efficace dans un modèle décentralisé
- Structure financière optimisée (Dette/Equity à 0.70)
Ce ROE place Burkhalter dans le top 1% des entreprises suisses en termes de rentabilité des capitaux propres.
Scores financiers parfaits
Piotroski F-Score: 9/9 – Score maximum de santé financière. Burkhalter remplit tous les critères de profitabilité, de solidité et d'efficacité opérationnelle.
Altman Z-Score: 5.06 – Très largement au-dessus du seuil de sécurité (3.0). Risque de faillite quasi nul.
Couverture des intérêts: 46.30x – L'entreprise génère 46 fois plus de résultat opérationnel que ses charges d'intérêts. La dette n'est absolument pas un problème.
Les signaux d'alerte pour l'investisseur
Valorisation devenue très chère
La qualité se paie, mais à quel prix?
- P/E de 25.54 contre 19.11 pour l'industrie (+34%)
- P/B de 14.40 contre 2.33 pour l'industrie (+518%)
- P/S de 1.24 contre 0.82 pour l'industrie (+51%)
Le marché a clairement intégré la qualité exceptionnelle de Burkhalter. La marge de sécurité pour un nouvel investisseur est quasi inexistante.
Payout ratio critique à 89%
Burkhalter distribue 89% de ses bénéfices en dividendes. Ce chiffre soulève deux problèmes:
1. Marge de manœuvre limitée: En cas de ralentissement, l'entreprise devra choisir entre couper le dividende ou réduire ses investissements/acquisitions.
2. Croissance future bridée: Avec seulement 11% des bénéfices réinvestis, la capacité à financer de nouvelles acquisitions repose sur l'endettement.
Pour comparaison, le payout ratio moyen du secteur est de 39.54%. Burkhalter distribue 2.3x plus que ses concurrents.
Croissance qui ralentit
Chiffre d'affaires TTM: +0.56% seulement. Après des années de forte croissance par acquisitions, le rythme faiblit. Le marché suisse se consolide et les cibles intéressantes se raréfient.
Autre point d'attention: le nombre d'actions a augmenté de 5.88% sur 10 ans, diluant progressivement les actionnaires existants.
Dividende: attractif mais fragile
Rendement actuel: 3.48% (dividende annuel de 4.85 CHF sur un cours de 139.20 CHF)
Ce rendement reste supérieur à la moyenne du secteur (2.32%) et correct dans l'absolu. Mais attention aux apparences:
- Croissance du dividende sur 5 ans: seulement 2.67% par an
- Payout ratio de 89%: aucune marge de sécurité
- En cas de retournement du marché immobilier, le dividende sera sous pression
Le dividende de Burkhalter est généreux aujourd'hui, mais potentiellement fragile demain.
Verdict 2025: excellente entreprise, mais mauvais timing d'entrée
Les forces indéniables
- Qualité financière exceptionnelle (ROE 57%, scores parfaits)
- Position de leader sur un marché fragmenté
- Modèle d'affaires résilient (marges 2x supérieures au secteur)
- Pas de risque de change (100% Suisse)
- Management discipliné et sélectif
Pourquoi je ne recommande pas d'acheter aujourd'hui
1. Valorisation excessive: Avec un P/E de 25.5 et un P/B de 14.4, vous payez une prime gigantesque pour la qualité. Le potentiel d'appréciation est limité.
2. Payout ratio dangereux: À 89%, le moindre coup dur forcera soit une coupe du dividende, soit un arrêt des acquisitions. Les deux scénarios feraient chuter le cours.
3. Croissance qui s'essouffle: +0.56% de CA, marché suisse qui se consolide, dilution des actionnaires. Les beaux jours de croissance rapide sont derrière.
4. Dépendance au cycle immobilier: En cas de ralentissement de la construction en Suisse, Burkhalter serait directement impactée.
Ma stratégie pour Burkhalter
Je place Burkhalter sur ma liste de surveillance avec des alertes de prix:
- Zone d'achat conservatrice: P/E sous 18 (environ 100-110 CHF)
- Zone d'achat acceptable: P/E sous 20 (environ 115-120 CHF)
- Prix actuel (139 CHF): aucun achat, valorisation excessive
Une correction de 15-20% rendrait l'action à nouveau intéressante. En attendant, il existe de meilleures opportunités sur le marché suisse avec des valorisations plus raisonnables.
Questions fréquentes sur Burkhalter
Burkhalter est-elle une bonne entreprise?
Oui, excellente. ROE de 57%, scores financiers parfaits, leadership sur son marché. C'est une des meilleures entreprises suisses du secteur industriel.
Pourquoi ne pas acheter si l'entreprise est excellente?
Parce que le prix est excessif. Un P/E de 25.5 et un P/B de 14.4 ne laissent aucune marge de sécurité. Acheter une excellente entreprise trop chère reste une mauvaise décision d'investissement.
Le dividende de 3.48% est-il sûr?
Non. Avec un payout ratio de 89%, il n'y a quasiment aucune marge de sécurité. Un ralentissement du marché immobilier forcerait probablement une réduction du dividende.
À quel prix Burkhalter devient-elle intéressante?
Sous 120 CHF (P/E autour de 20), l'action redevient acceptable. Sous 110 CHF (P/E autour de 18), elle devient attractive pour un achat progressif.
Burkhalter peut-elle continuer sa croissance?
Difficile. Le CA croît de seulement 0.56%, le marché suisse se consolide, et le payout ratio de 89% limite les ressources pour financer de nouvelles acquisitions.
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C’est effectivement une belle société, et, au passage, une belle analyse. Merci dividinde.
Comme d’habitude mes goûts diffèrent légèrement des tiens, sans non plus être totalement opposés.
On peut apprécier tous les deux les jolies filles, mais avec une préférence pour les brunes ou les blondes. Dans ce cas je trouve que Burkhalter est un peu cher dans une approche valeur pure. Le dividende donne l’illusion que le titre est bon marché, au détriment d’un ratio de distribution élevé.
Par contre si on est orienté croissance ça vaut le coup d’oeil effectivement. Rien que le graph du cours donne des palpitations ! Youhou!
Merci Jérôme. On va dire que Burkhalter est une brune aux yeux bleus… 🙂
D’habitude, j’essaie d’éviter un payout ratio trop élevé, mais dans le cas de Burkhalter j’estime que le modèle d’affaires stable et la bonne visibilité des bénéfices futurs constituent une base solide pour des dividendes croissants à long terme.
Brune aux yeux bleus. J’achète! 🙂
Bing, dans les (mes) dents
C’est un peu le problème avec ces titres de croissance survalorisés. Le marché les pénalise fortement au moindre problème. De plus le payout ratio était élevé et donc le dividende va baisser suite au bénéfice plus faible.
Je continue à penser que l’analyse de dividinde est correcte : c’est une belle entreprise. Mais elle était un peu chère. Maintenant elle l’est nettement moins!
Ajoutons là dessus l’adage qu’on n’achète pas un couteau qui tombe, cela veut dire qu’il faut laisser passer l’orage et voir dans 6 à 12 mois s’il faut s’en prendre une louche.
Je pense au contraire que mon analyse n’était vraiment pas fameuse et j’ai occulté certains points faibles tant j’étais convaincu de cette entreprise. Je n’ai pas su rester suffisamment objectif et la bourse est toujours là pour nous rappeler nos erreurs.
Burkhalter était en plus une grosse position dans mon portefeuille et j’ai pris une sacrée claque aujourd’hui. Ma fois ça fait partie du jeu et j’en accepte les règles, on ne peut pas être gagnant à tous les coups. Ce n’est ni ma première ni ma dernière déculottée à la bourse.
Et surtout ça ne m’empêchera pas d’aller de l’avant, je ne m’arrêterai pas avant d’avoir atteint mon objectif d’indépendance financière 🙂
L’important c’est d’en tirer des leçons, notamment:
-ne pas tomber en amour (comme disent les québécois) d’un titre
-suffisamment diversifier
-ne pas acheter trop cher
J’ai aussi merdé l’année passée avec Astaldi. Malgré une chute vertigineuse, l’impact à été insignifiant sur mon portefeuille car la position était petite.
Je préfère pêcher par excès de diversification que le contraire.
C’est juste, Auguste. Mais je trouve que la plus grosse difficulté c’est ton dernier point: „ne pas acheter trop cher“, parce que la notion de bon marché et de cher varie en fonction des bénéfices.
Dans l’exemple de Burkhalter, je trouvais la valorisation plutôt raisonnable, mais quand le bénéfice plonge de 20% le PER monte automatiquement de 20% et d’un seul coup la valorisation n’est plus raisonnable.
C’est pour ça que je n’accorde pas trop d’importance aux bénéfices. Ils sont volatils. Les gagnants d’hier sont les perdants de demain et vice versa. Le PER est un indicateur assez peu fiable, tant du point de vue de sa constance que du point de vue de la confiance qu’on peut lui prêter (trop facilement manipulable).