Dernière mise-à-jour : 2 janvier 2017
Le 11 mars 2012 le peuple Suisse a accepté l'initiative pour limiter le nombre de résidences secondaires par commune à 20% des logements totaux. Ce texte de loi est l'oeuvre de l'écologiste extrémiste Franz Weber et de sa fille. La campagne de vote a été rythmée par des coups bas provenant des partisans et opposants à l'initiative, mais ce que l'on retiendra le plus en définitive c'est que le poids des images a eu un impact significatif sur l'issue du vote.
L'argument du comité d'initiative était que le territoire suisse, et notamment alpin, était victime de "spéculateurs" (mot martelé par F. Weber) dont la seule volonté aurait été de dégager de juteux bénéfices, avec pour conséquence une construction massive et sauvage de résidences secondaires. En fixant la limite de ces résidences à 20%, l'écologiste, jamais a court d'idées farfelues, a pour objectif de faire cesser ce bétonnage et retrouver le monde des bisounours dont il a toujours rêvé.
Quand vous partez en vacances, à la montagne comme à la plage, vous avez envie de prendre du bon temps, déstresser, et surtout ne pas être entassés comme des sardines, avec votre voisin d'à côté qui dégage une odeur mélangée de transpiration et de crème solaire. Ecolo ou pas, on cherche tous un joli petit coin de paradis, avec quelques infrastructures quand même, mais dont le tout reste à taille humaine.
Voilà le genre d'images qu'on nous a servi durant la campagne. On y voit le village de Verbier, célèbre station du canton du Valais, de haut. La photo est bien ciblée sur le centre de la station, avec aucun aperçu des alentours. En voyant ce cliché, si j'étais genevois, et que je ne connaissais pas ou peu le Valais, j'aurais immédiatement voté oui à l'initiative. C'est un peu comme si l'on vous proposait de limiter le nombre de plages privées sur le bord de la Méditerranée. Vous auriez hésité vous ?
Prenons un peu de recul, à tous points de vue. Verbier n'est certes pas le meilleur exemple de développement harmonieux avec la nature, et ce n'est pas pour rien que ce village a été instrumentalisé durant toute la campagne. Pourtant si l'on prend un angle plus large, la même station paraît soudain déjà beaucoup plus conviviale...
Curieusement, on ne nous a jamais parlé de la plus célèbre station valaisanne, Zermatt, dans laquelle les voitures sont interdites et qui n'est accessible que par le train. Le village est un modèle de développement qui s'est fait en harmonie avec le paysage. La commune compte pourtant 45% de résidences secondaires et les touristes qui s'y rendent ne s'en plaignent pas... et on peut les comprendre...
Enfin quand je vous dis qu'on n'en a jamais parlé, ce n'est pas tout à fait vrai... voilà le genre de photo montage qu'on peut trouver sur le site des Verts suisses. Quiconque connaît un tant soit peu cette station sait que jamais ses habitants ne laisseront faire une chose pareille. Utiliser ce genre d'illustrations va bien au-delà de la désinformation, c'est de la manipulation pure et dure des opinions.
Mais continuons notre petit tour d'horizon. En nous montrant uniquement des grosses stations touristiques, on nous a menti non seulement en parole, mais aussi par omission. Prenons Bettmeralp, petite station du Haut-Valais, qui compte elle aussi plus de 20% de résidences secondaires. Comme Zermatt les voitures y sont interdites, et on ne peut y accéder que par... téléphérique. Au fait téléphérique, ça rime avec féerique, non ?
J'en n'ai pas fini. Grächen, toujours dans le Haut-Valais, et toujours plus de 20% de résidences secondaires. Je sais pas vous, mais on est quand même très loin d'un tourisme de masse genre Rimini...
Ci-dessous, toujours dans le Haut-Valais, Leukerbad, 72% de résidences secondaires, connue pour ses sources thermales et ses "petits" soucis financiers de l'époque. Si les méchants spéculateurs de Franz Weber sont passés par là, il faut croire que les eaux thermales les ont passablement assagis...
Mais assez parlé des stations, le Valais, principal visé par l'initiative Weber, compte un nombre incalculable de régions de montagnes peu peuplées. Beaucoup d'habitations sont des chalets que les valaisans ont hérité de leurs parents, et qui sont donc des résidences secondaires. Puisque peu d'habitants vivent en permanence à l'année dans ces régions, la proportion de résidences secondaires y est forcément importante.
Le Lötschental, même s'il est particulièrement sauvage et préservé du tourisme de masse, traverse pourtant cinq communes qui comptent chacune plus de 20% de résidences secondaires. Donc si par hasard vous aviez envie de vous y construire un petit foyer pour vos week-ends et vos vacances, vous pouvez oublier.
Même chose dans la Vallée de Conches, qui a misé sur le tourisme pédestre et le ski de fond. Malgré sa faible densité de population, tout passionné de nature que vous pourriez être, grâce à Weber, c'est foutu pour y construire votre chalet.
Toutes les communes du Val d'Hérens possèdent également plus de 20% de résidences secondaires. Les Hérensards ont toujours privilégié le tourisme doux à celui de masse. Vélo, raquettes, randonnée, ski de fond et peau de phoque y sont rois. Fruit d'une collaboration entre la commune de Saint-Martin, le Canton du Valais et la Confédération Suisse, le projet Ossona est le symbole de cette symbiose avec la nature. Le Val d'Hérens n'a pas attendu Franz Weber pour protéger sa faune et sa flore. Mais encore une fois, et malgré la faible densité de population, vous ne pourrez plus non plus y construire votre petit nid douillet, à moins d'y habiter à l'année...
On le voit dans les photos précédentes on est bien loin des clichés affichés dans la presse durant la campagne de l'initiative. Ceci se confirme de plus belle ci-dessous avec le Val d'Anniviers, dont les communes St-Luc et Grimentz (que l'on voit-ci dessous) sont les communes de Suisse qui comptent le plus de résidences secondaires avec plus de 80%.
En donnant un chiffre totalement arbitraire et en le mettant en relation avec des illustrations délibérément extrêmes, Franz Weber a semé la confusion dans l'esprit des Suisses et les a induits en erreur. On le constate sur les photos ci-dessus, un taux élevé de résidences secondaires ne rime pas forcément avec du bétonnage massif, bien au contraire.
Le Valais compte énormément de régions de montagne peu peuplées, les générations précédentes ayant dû s'exiler dans la pleine du Rhône, sur le canton de Vaud ou à Genève, là où il y a du travail.
Ces générations ont laissé en héritage à leurs enfants des chalets, mayens et mazots. Malheureusement il n'est pas possible d'y vivre à l'année, à moins d'être suffisamment riche pour ne pas devoir travailler. Franz Weber met donc dans le même panier des "méchants spéculateurs" et de simples citoyens qui ont hérité d'une résidence secondaire. Il mélange aussi des stations comme Verbier ou Crans-Montana avec des communes comme Grimentz ou St-Martin. Enfin, il crée une barrière d'entrée qui réserve l'accès aux résidences secondaires aux riches seuls, comme lui.
Si l'on compare la carte de densité de la population ci-dessus avec celle-ci dessous sur laquelle figurent en rouge les communes dont le taux de résidences secondaires dépasse les 20%, on se rend compte qu'elle sont pratiquement identiques, mais à l'inverse. Cela signifie que le problème ne vient pas des résidences secondaires, mais des résidences principales.
C'est en effet le manque de résidences principales qui fait grimper artificiellement le taux et qui suscite la polémique. En fixant une limite arbitraire à 20%, Franz Weber coupe les régions de montagne de leurs revenus. Ce faisant, il crée un surplus d'exode rural qui provoque à son tour une baisse des résidences principales dans ces régions, et donc une montée du taux de résidences secondaires ! C'est le serpent qui se mord la queue.
Franz Weber est né à Bâle. Cette ville au croisement de la Suisse, de la France et de l'Allemagne dégage une vitalité économique considérable, notamment dans l'industrie chimique/pharmaceutique. Malgré le développement de l'industrie, il fait bon vivre à Bâle. C'est une ville riche non seulement d'un point de vue économique, mais aussi culturellement et historiquement. Limiter le Valais et ses résidences secondaires à un cliché discutable de Verbier, c'est un peu comme si l'on limitait Bâle, et même tout le nord de la Suisse, à la photo de Schweizerhalle ci-dessous. Faites voter quelqu'un sur un sujet écolo en lui brandissant ce cliché et vous verrez le résultat...
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Très bon article sur le sujet.
Weber est un extrémiste qui a su, contre toute attente, faire passer une votation stupide et qui va poser de sérieux problèmes à mettre en application. Le pourcentage aurait au moins dû être adapté au cas par cas…
Maintenant, il faut bien reconnaître aussi que l’appât du gain a séduit de nombeux Valaisans qui se sont lancés dans la spéculation immobilière. C’est uniquement eux qu’il aurait fallu viser…
Un petit mot sur Verbier… Je m’y suis rendu quelques fois lorsque j’habitais en face, à Champex, je peux dire que cette station est un échec total de l’aveu même de ceux qui y jouent un rôle (commerçants, hôteliers, travailleurs divers…) Les lits froids y sont légion et hors saison de ski, c’est complètement mort.
Quant à Zermatt, sa réussite vient de son hôtellerie. Aucune autre station ne peux présenter une telle offre !
Thierry.
Merci Thierry. Il est bien clair qu’en choisissant Verbier comme image choc les partisans de l’initiative étaient déjà partis avec une longueur d’avance…
Je vis à Verbier, et comme l’mmense majorité des habitants, j’en suis heureux , mes enfants aussi.
Zermatt ne se porte pas si bien, c’est la station qui est obligée d’embaucher le plus d’étrangers. Lorsqu’un bagnard (Verbier) paie Fr. 100.- à l’Etat, le contribuable de Zermatt paie Fr. 57.-, Il paie aussi 3’5 fois plus en fortune. Le nombre de R2 diminue depuis dix ans à Bagnes et augmente à Zermatt. Et chez nous la zone à construire à diminué et il n’y a plus que 2 zones à construire : Verbier et Bruson. soit 1,5 KM2 sur les 296 KM2 de notre commune. Mais c’est vrai que Mr Weber, quand il vient à Verbier, préfère se promener entre les bâtiments plutôt que de profiter des 150 KM2 de notre zone protègée ou des endroits splendides de notre région.
A ce sujet, le canton de GE a sensiblement la même surface que Bagnes et pourtant, il héberge 6 fois plus de R2 que Bagnes. De 1980 à 2000 le canton de GE à agmenté le nombre de R2 de 118,9 %, VD de 104 %, Bl, précisément, de 270,2 %, ZH de… 314,9 %. Pendant ce temps, en Valais les R2 n’ont augmenté que de 27,3%, TI:42,3 % et GR: 41,5 % !
Monsieur Guinnard,
Vous êtes heureux, avec votre famille, à Verbier, je m’en réjouis très sincèrement. Mais il ne vous aura pas échapper que Verbier est une ville fantôme hors saison.
Par ailleurs, qu’y a t il de mal à engager des étrangers ? Pensez-vous que les Suisses accepteraient de faire le travail que font les Portugais à Zermatt au même salaire ?
Bien à vous,
Thierry.
Je ne crois pas, Thierry, que ce soit le lieux pour faire un cours d’économie. Mais posons-nous la question : à qui et à quoi doit servir le tourisme, et comment? Nous avons besoin d’entre-saisons , pour notre vie sociale, pour utiliser les engins de chantier (la rénovation fait du bruit, de la boue et de la poussière, etc.). C’est à l’entre-saison que nous pouvons organiser les infrastrustures et l’accueil de nos hôtes. Et ce n’est pas le désert, c’est une activité intense… et la plus payante. La rénovation, la reconstruction et l’entretien de notre parc immobilier (valeur 5 milliards?) occupe annuellement plus de 1500 personnes, bien rémunérés, dont profitent nos indigènes et non des étrangers. L’apport du touriste non proprétaire, est faible, environ 23 % du chiffre d’affaire de la station, selon une étude. Même un appartement vide rapporte. En 2006, nous avon calculé qu’un appartement loué laisse annuellement Fr. 48’200.- et non loué Fr.32’800.- à l’économie locale (analyse de 352 appts). La lex Weber n’y changera rien à ce sujet, parce que ces chiffres ne concernent pas la promotion immobilière faite pour la vente. Verbier est une station réussie qui évolue. Réussie, oui, parce qu’elle satisfait sa population et peut beaucoup investir. Reprenez ma question ci.dessus.
Monsieur Guinnard,
Vous avez esquivé ma question sur les étrangers…
Zermatt engage aussi beaucoup de Suisses, rassurez-vous. L’immeuble que j’occupe (à Täsch) est majoritairement peuplé de Suisses travaillant sur Zermatt.
Zermatt connait aussi une entre-saison, mais beaucoup plus courte qu’à Verbier. Ce matin, j’ai randonné sur l’Europaweg entre Täsch et Zermatt et il y avait encore beaucoup de monde. Malgré cela, les travaux se font à Zermatt, comme à Verbier. Je ne vois pas la nécessité d’avoir une saison d’été minimaliste.
Vous me demandez à quoi doit servir le tourisme… En fait, il ne sert à rien ! Le tourisme est un loisir, rien de plus. Il n’a aucune utilité autre qu’économique et est le plus souvent nuisible en raison du comportement indécent de la grande majorité des gens.
Mais le fait est que le tourisme existe et qu’il convient de le gérer. Hélas, toutes les stations font tout pour le tourisme d’hiver et peu pour le tourisme d’été, un skieur rapportant beaucoup plus qu’un marcheur. A long terme, c’est une erreur puisque la saison hivernale se réduira inévitablement.
Bien à vous,
Thierry.
Pour les travailleurs étrangers Thierry, j’ai répondu. C’est vrai, si le tourisme sert surtout les intérêts des travailleurs étrangers, c’est grave. Par contre les propriétaires étrangers, nous confient volontier la gestion et la location de leur bien immobilier. Ce n’est pas le cas des suisses. Or, il n’y a en moyenne que 21% de propriétaires étrangers… Mais savez-vous que nous avons un taux d’occopation de nos logements de 69 % depuis 6 ans et sur l’année. Les hôtels de montagne sont vides et sans vie en moyenne 60 % de l’année, Zermatt faisant un peu mieux grâce au Cervin, mais vous l’avez appris, même les Seiler se sont débarrassé de leurs hôtels… pour les reprendre avec d’autres financements. De plus, en 1988, les Zermattois avaient un projet pour construire un village réservé aux indigènes, au-dessus de Zermatt pour pouvoir se couper du tourisme à certaines périodes, se créer des entre-saisons.
En fait, le touriste n’est qu’un moyen de satisfaire le visité. Il est stupide de dire que le client est roi. Ainsi, si l’on pouvait remplacer avantageusement le tourisme par autre chose, cela se ferait.
Sorry, il faut lire « … zones touristiques » et non » … zones à construire » Merci
Très bel article
L écologie est une noble cause, mais en France et a priori en Suisse parfois elle est incarnée par des politiciens verts peu recommandable
La chef des verts français c dufflot est en train de faire passer des lois en France sur le même accabit (logement social) populiste et simpliste et qui dans les faits sont contre productive, innaplicable et ne serviront qu a taxer les villes riches au profit des villes pauvres pour leur permettre de faire des HLM souvent très moche et défigurant le paysage
J ai cru remarque en parlant de bisounours que beaucoup de gens de gauche et d’ ecolo en France ont des discours surrealistes
C est a dire ils ont tout fait dans leur vie professionnelle pour pietiner les autres et destruire la nature ( c est fou le nombre d’ ecolo bobo a Paris qui roule en SUV 4*4)
Et qui par culpabilité te font un discours de gauche et ecolo…
Mr. Guinnard,
Je vois rejoins partiellement quand vous parlez de Zermatt. Le développement n’y est pas si harmonieux et ceux qui prétendent le contraire n’y ont probablement jamais mis les pieds! Ceci dit Verbier a été pendant longtemps protégé par la presse romande et il était temps qu’elle se fasse botter les fesses. Elle a largement dérapé au niveau construction. Pour s’en persuader il suffit de monter à la Croix de Cœur pour avoir une vue d’ensemble. De plus, à chaque reportage tv ou radio, les Bagnards ont essayé d’expliquer que la seule station pour laquelle le modèle de résidence secondaires fonctionne est Verbier. Pour m’y être rendu également un bon nombre de fois hors saison, je me permets d’en douter sérieusement.
ceci dit c’est vrai que la région est jolie et les gens sympathiques
Amicalement.
Thierry a dit :
« Très bon article sur le sujet.
Weber est un extrémiste qui a su, contre toute attente, faire passer une votation stupide et qui va poser de sérieux problèmes à mettre en application. »
Le peuple Suisse est stupide , il trouve une majorité claire et nette pour dire non à ce massacre généralisé –
Le comble quand on additionne le nombre de cantons qui ont osé approuver ce référendum , ils sont peuplés d imbéciles
Ne transgressez pas mes propos svp. Le peuple Suisse n’est pas stupide, il a juste voté une loi qui l’est. Comme Jérôme l’a montré, on a influencé son opinion en se servant d’images choc.
Qu’est-ce que c’est beau la Suisse 🙂
Pour le reste… je ne m’en mêle pas, je suis ici pour parler dividendes 😉
Je te reconnais bien là Lopazz 😉
En tout cas on ne peut pas mettre en doute la sincere volonte de Monsieur Weber de proteger l’espace alpin, tout comme il l’a fait pour Lavaux. Tout au plus, peut on lui reprocher ses gouts vestimentaires. Kim Jong Ill etait-il son tailleur? 🙂
Plus serieusement, cette loi n’aurait jamais du passer tellement l’application est peu claire, mal fagotee et mal pensee. Je jette la pierre a notre systeme de democratie directe qui est un peu desuet. Ces fonctionnaires de Berne auraient du rendre l’initiative non valide car non-applicable.
On demande egalement a des grand-meres de voter sur des sujets complexes tel que le systeme de retraites alors qu’il faudrait etre economiste et/ou actuaire pour y repondre.
De toute facon, je rejoins Lopazz…on veut des dividendes….ka ching ka ching!